Jésus le Martien ?
(suite)

Thierry Guignabaudet

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J Chrestos / Christos
J Suétone (en construction)
J Bucaille, le Coran, et la science
J Géographie évangélique
J Capharnahum, au 36ème sous-sol
J Boxif chez les marchands du Temple
J Guérisons
J Un original de Marc écrit en latin ? (en construction)
J Chimie
J Quand un Martien recrute
J Quand un Martien enseigne
J Vieux habits et vieilles outres
J Fin de carrière
J Sectes, mensonges, et idéaux
J Retour sur Flavius Josèphe
J Les frères de Jésus
J Le lieu de la Cène
J Procès
J Exécution
J Le Golgotha (nouveau chapitre, 01.05.03)
J Le disciple que Jésus aimait
J Marie de Magdala, mère du Fils
J Un Martien aux Enfers
J Conclusion

 

Christos / Chrestos

Encore un mot sur le Dieu Bon de Marcion. En grec, "bon" se dit chrestos : le dieu des premiers chrétiens s'appelait-il Christos ou Chrestos ? Et les chrétiens eux-mêmes, comment nommaient-ils leur groupe ?

On lit dans les Actes (11.26) : C'est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de chrétiens. C'est certainement faux.

Primo, parce que christianos vient du latin christianus, le suffixe -anos n'existant pas en grec ; pour désigner l'appartenance à un groupe, le grec utilise -ikos, comme dans stwikos, stoïcien, ou ellhnikos, grec. Si les chrétiens avaient reçu ce nom à Antioche, ville de langue grecque, le texte des Actes porterait Cristikous et non Cristianous.

Secundo, parce que Paul n'utilise jamais ce mot ; il appelle les fidèles les saints :

Partagez avec les saints suivant leurs besoins. (Rm 12.13)
Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ?
Et si le monde doit être jugé par vous...
(1 Cor 6.2) etc...
Tertio, parce que même les Actes n'utilisent jamais ce terme : Paul est présenté au gouverneur Félix comme étant "nazoréen" (24.5). Quand le rédacteur prétend que le roi Agrippa manque de se faire "chrétien" (26.28) en écoutant le discours de Paul, il oublie que personne n'a dit à Agrippa ce qu'était un chrétien... L'auteur de cette partie des Actes devait être assez éloigné de la culture hébraïque pour oser écrire que Dieu s'est adressé à Paul (26.14) en citant la littérature grecque! (Il est dur de regimber contre l'aiguillon., Eschyle, Agamemnon, v. 1623)

Quarto, parce que si "chrétien" venait de "christos" et voulait dire "partisan du Messie", alors on n'aurait pas pu distinguer les fidèles de Jésus des autres Juifs, qu'ils aient reconnu comme messie Hérode, Theudas, ou Bar Kocheba, ni des gnostiques simoniens, cités plus haut. Il faudrait attendre la fin des espérances juives terrestres, avec l'écrasement de Bar Kocheba, pour qu'il ne reste plus que les partisans de Jésus à attendre le retour du Christ (gnostiques compris).

Ce qui fait une preuve de plus que les "témoignages profanes" de Josèphe, de Pline, de Suétone, et de Tacite, où apparaît le mot christianos ou christianus, sont des faux.

Tertullien écrit (en latin) :

Le mot christianus, selon son interprétation, dérive du mot onction. Même quand vous le prononcez chrestianus (car il n'est pas exactement connu de vous), il est composé de douceur ou de bonté. On hait donc chez des gens inoffensifs un nom tout aussi inoffensif. Mais, dira-t-on, on hait la secte dans le nom de son fondateur...
(Apologétique, 3.5-6)
Pourquoi Tertullien n'insiste-t-il pas sur cette "onction", pourquoi n'explique-t-il pas ce nom à partir de cette étymologie là ? Le texte n'aurait-il pas été corrigé ? Ne faudrait-il pas lire : Le mot chrestianus est composé de douceur ou de bonté. On hait donc chez des gens inoffensifs un nom tout aussi inoffensif. Mais, dira-t-on, on hait la secte dans le nom de son fondateur...Mais Tertullien ayant écrit un Contre Marcion, il est difficile de rétrovertir son texte dans un sens marcionite. Encore que... N'a-t-il pas varié au cours de son existence ? N'a-t-il pas raté sa canonisation pour avoir terminé ses jours dans l'hérésie montaniste ? Et je lis dans la préface de mon édition : L'Apologétique a d'abord passé pour un plagiat de l'Octavius de Minucius Félix.[...]
Le texte nous est connu par deux familles de manuscrits dont les divergences sont irréductibles.[...] Le texte fut redécouvert en 1483.[...] François de Maulde découvrit le Codex de Fulda, disparu depuis. [...] S'agissant de Tertullien, les éditeurs ont rarement été à une malveillance près.
Et voilà sur quoi on doit travailler quand on veut étudier la genèse du christianisme!
Après ça Marrou peut bien critiquer Hardouin (Chronologie expliquée par les médailles, 1696) pour avoir prétendu que l'histoire ancienne fut inventée par les moines d'après Hérodote, Pline, et quelques autres.Mais interrogeons d'autres apologistes du second siècle : À ne considérer que ce nom qui nous accuse, nous sommes les meilleurs des hommes. [...]
Nous sommes accusés d'être chrétiens : est-il juste de haïr ce qui est excellent ?
(Justin, Grande Apologie, § 4)

Ceux qui croient en Christ sont et se nomment bons.
(Clément d'Alexandrie, Stromates, II, 4)

Il est évident que ces arguments ne peuvent fonctionner qu'avec "Chrestos". Les Evangiles ayant été revus et corrigés, je ne pensait pas y trouver une once de "Chrestos". Mais voyez plutôt ceci :

Et il [Jésus] leur demandait : mais vous, qui dites-vous que je suis ?

Marc (8.29) : Pierre répondant lui dit : Tu es le Christ.
Matthieu (16.16) : Répondant, Simon-Pierre dit : Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant.
Luc (9.20) : Pierre répondant lui dit : Le Christ de Dieu.

Les additions de Luc et Matthieu ne fonctionnent qu'avec "Christ" (l'"oint" et "fils" de Dieu, c'est à dire le roi de Judée, 2 S 7.14) Dans Marc, la réponse marche aussi bien avec Chrestos. Par conséquent, ces additions, destinées à encadrer la version "christos", prouvent que le mot "Chrestos" se trouvait dans un nombre considérable de copies de Marc, et certainement dans l'original marcionite.

De plus, Jésus pose la question à tous les apôtres, et seul Pierre répond, puis Jésus "leur" enjoint de se taire. Donc, primitivement, tous répondaient : Tu es Chrestos. Mais Rome ayant eu besoin d'affirmer la primauté de Pierre...

Cent à cent cinquante ans plus tard, au début du IVème, l'apologiste Lactance écrit :

Ignorants de nos affaires, ils appellent Christus Chrestus, et les christianus chrestianus.
(Institutions divines, IV.7)
La Firme : Ce sont les païens qui ont inventé le nom de "Chrestus". C'est une mauvaise prononciation de "Christus". C'est un phénomène linguistique très connu qui s'appelle "iotacisme". (Apologétique pour les poires, ed. Belzébuth)Argument bidon : le iotacisme, c'est précisément le phénomène contraire, le passage du e au i. Par exemple : les mots latins conducere, oleum, puteus ont donné en français conduire, huile, puits ; dans les langues européennes, le latin magister n'a laissé aucun son i : maître, master, maestro... ; le mot français Tenez! a donné en anglais tennis.

Autre exemple, quand le français est déformé par un arabophone (ou par un yiddishophone dans Les aventures de Rabbi Jacob) : Oh! Li yoli piti bibi!

D'ailleurs, en arabe, le iotacisme a donné dinar à partir du latin denarius, et dirham d'après le grec drachme.

Suétone ----Donc, quand on trouve dans Suétone : en latin

 

Bucaille, le Coran, et la science

Petite parenthèse sur le Coran (car l'archange Gabriel, de qui Mahomet tenait sa science, était aussi un extra-terrestre, selon la révélation raëlienne ; peut-être venait-il de Sirius : C'est lui qui est seigneur de Sirius, sourate 53 v. 49) : le sieur Maurice Bucaille a pondu un ouvrage intitulé La Bible, le Coran, et la science où, après avoir éreinté la Genèse et les Evangiles, il trouve une pensée scientifique au détour de chaque verset coranique, ou peu s'en faut, car, apprend-on à l'avant-dernière page (quel courage!), à la différence des deux Testaments, le Coran a pour auteur l'archange Gabriel lui-même.

Le coup de l'archange Gabriel n'a pas convaincu certains contemporains de Mahomet. Un de ses scribes, Abd Allah ben Sad Abi Sarh, rapporte que le Prophète ayant dit Et Dieu est puissant est sage, il suggéra d'écrire Dieu sait et il est sage, et le Prophète répondit qu'il n'y voyait aucune objection. Ayant observé une série de changements de cette sorte, Abd Allah renonça à l'islam au motif que si ces révélations venaient vraiment de Dieu, elles ne devaient pas être changées sur la suggestion du simple scribe qu'il était... (Ibn Warraq, p.150)

Le Coran a gardé trace de cette inspiration vagabonde de Mahomet : Si Nous abrogeons un verset ou si Nous le faisons oublier, Nous en apportons un meilleur (2.106)

Bucaille commit ensuite Réflexions sur le Coran, de la même veine.

Ainsi les versets

N'avons-nous pas fait de la terre une couche et placé les montagnes comme des piquets ? (78.6-7)
Nous avons disposé sur la terre des montagnes immobiles afin qu'elle ne s'ébranle pas en les entraînant. (21.31)
concorderaient "avec les données modernes de la géologie". Bucaille ose écrire : De ce phénomène de plissement résulte une stabilité de l'écorce terrestre. Je n'ai sans doute pas lu les mêmes ouvrages de géologie que Bucaille car, dans mes sources, c'est l'instabilité de l'écorce terrestre qui provoque des plissements aux jointures des plaques... Toujours est-il que ces versets ressemblent à ceux-cis :

Il déploie les cieux comme une tenture [...]
Il pose la terre sur ses assises,
Elle ne chancellera pas, à jamais.
(Ps 104.2-5)

Autre trouvaille : Dieu a créé sept cieux et autant de terres. (65.12)

Bucaille : Ainsi est établi le concept de la pluralité des mondes !

Sauf que ces sept cieux sont communs à toutes les cosmologies du coin, chacun étant un étage où gravite un astre mobile (soleil, lune, et les 5 planètes connues de l'antiquité). Quand aux sept terres, ce sont sept cercles infernaux

Il étend le nord sur le vide, il suspend la terre sur rien. (Job 26.7)
Il trace un cercle sur la face des eaux
jusqu'à la jointure de la lumière et des ténèbres.
(Job 26.10)

Je ne vois pas comment Matthieu et Mahomet auraient pu tirer de cela autre chose qu'une terre plate, circulaire, et immobile. D'ailleurs Bucaille note que le Coran dit : Dieu a créé les cieux sans piliers que vous puissiez voir. (31.10) Il en déduit que cela réfute l'existence de piliers! Alors pourquoi les mentionner ? Cela établit plutôt des piliers invisibles...

Interrogeons à ce sujet le cheik Abd el Azis el Baz, suprême autorité religieuse de l'Arabie saoudite

La terre est plate. Celui qui déclare qu'elle est sphérique est un athée méritant une punition. (International Herald Tribune, 13.02.1995, p.1)

Quant à la pluralité des mondes... Pour le Coran, les étoiles sont posées sur un rideau séparant la demeure divine du monde terrestre :

Nous avons décoré le ciel le plus proche d'un décor, les étoiles, afin de le protéger contre tout diable rebelle. Ils ne pourront être à l'écoute des dignitaires suprêmes (les anges) car ils seront harcelés de tous côtés et refoulés. Et ils auront un châtiment perpétuel. (37, 6-9)

Bucaille écrit qu'il est "scientifiquement inacceptable" que Dieu sépare les eaux du ciel de celles de la terre. Or le Coran en fait autant dans un verset que Bucaille évite de citer : Ceux qui ont mécru n'ont-ils pas vu que les cieux et la terre formaient une masse compacte ? Ensuite, nous les avons séparés et fait de l'eau toute chose vivante. Ne croiront-ils donc pas ? (21.30) Il se contente de versets (25.53; 35.12; 55,19 sq) où il y a une mer d'eau douce et une autre d'eau salé qui ne se mélangent pas, phénomène que Bucaille va chercher en Basse Mésopotamie et à l'embouchure du Mississippi! Vous avez pu lire plus haut ce qu'étaient l'apsou et le tiamat...

L'eau est une métaphore du sperme dit l'exégèse coranique : Dieu a créé tous les êtres vivants à partir de l'eau. (24.45) Les Egyptiens en pensaient autant qui faisaient du Nil le sperme d'Osiris. Quand on habite le désert, il est fatal de davantage philosopher sur le rôle de l'eau que lorsqu'on est natif d'Amazonie...

J'avais d'abord écrit que Bucaille avait "éreinté la Bible et les Evangiles". Mais je constate qu'il n'a pas écrit une ligne sur les exploits de Moïse : la traversée de la mer Rouge à pieds secs serait-elle scientifiquement possible ? Ou serait-elle vraie parce que Mahomet y a cru ? La science de Bucaille lui aurait-elle confirmé que la mission de Moïse consistait à expulser les Égyptiens d'Égypte comme l'affirme la septième sourate ?

Les notables du peuple de Pharaon dirent : Voilà certes un magicien chevronné. Il veut vous expulser de votre pays. (v. 109-110, le "vous" ne s'adresse pas au Pharaon qui est tutoyé dans le reste du texte)

Même surprise pour le récit biblique du Déluge : quand je relis Bucaille, je constate qu'il ergote sur la date des événements mais non sur leur réalité historique ! Ce qui nous vaut un chapitre intitulé "le récit coranique du Déluge" où l'on apprend que "la Bible fait état d'un déluge universel [tandis que] le Coran mentionne plusieurs punitions infligées à des collectivités bien définies" , et Bucaille de citer 25.35-39 en évitant le verset 40 qui nous apprend qu'il s'agit de Sodome, et par conséquent que ces différentes punitions sont étalées dans le temps.

Il paraît aussi que "le Coran présente le cataclysme du Déluge comme une punition réservée spécifiquement au peuple de Noé" mais Bucaille est bien incapable de trouver un seul verset coranique énonçant que "le peuple de Noé" désigne autre chose que l'ensemble de ses contemporains d'avant le Déluge... Autre "oubli" : comment expliquer scientifiquement que l'Arche ait vogué "au milieu de vagues hautes comme des montagnes" (11.42) ?

Pas de commentaire non plus sur la version coranique des aventures de Jonas :

Le poisson l'avala alors qu'il était blâmable.
S'il n'avait pas été parmi ceux qui glorifient Allah,
Il serait demeuré dans son ventre jusqu'au jour de la résurrection.
(37, 142-144)
Il doit y avoir dans nos océans un certains nombre de poissons qui y barbotent depuis la nuit des temps pour avoir avalé des impies... Mais "est-il rien d'impossible à Dieu ?" (Gn 18.14)

À propos des sources de Mahomet, Bucaille ose écrire (BCS, p.188) : Où est donc cette preuve de la reproduction dans le Coran de ce que les rabbins lui auraient appris ou dicté ?

D'abord, le Coran lui-même témoigne de cette rumeur :

Il disent : "Ce sont des contes d'anciens qu'il se fait écrire!
On les lui dicte matin et soir!"
(25.5)

Nous savons parfaitement ce qu'ils disent :
"Ce n'est qu'un être humain qui lui enseigne."
(16.103)

Ensuite, je vous renvoie au Talmud :

 

Talmud

Coran

Original des textes sacrés gardé au Ciel

Pirké Aboth, 5.6

Sourate 85.22

Sept paradis

Chegiga 9.2

17.44 ; 23.86 ; 41.12 ; 65.12

Sept enfers

Zohar 2.150

15.44

Cloison séparant le Paradis de l'Enfer

Midrash Qohelet Rabba
sur Ecclésiaste 7.14

7.46

Appétit de l'Enfer

Othioth Rabbi Akiba 8.1

50.30

Allaitement pendant deux ans

Ketuboth 60.1

2.233 ; 31.14

Pureté lors de la prière

Berachoth 31.12, 111.4

4.43

Ton médian de la prière

Berachoth 31.2,

17.110

Ablutions rituelles

Berachoth 46

5.6

Et caetera...

   

Moralité : si tu rencontres Bucaille, giffle-le ! Si tu ne sais pas pourquoi, lui, il le sait.

Et puisque nous parlerons plus bas des conceptions évangéliques en matière de tolérance, intéressons-nous aussi à cet islam "laïque et intégré" dont un discours politiquement correct nous rebat les oreilles :

- qui du musulman tolérant et du musulman intolérant est le meilleur musulman ?

Ne sont pas égaux ceux des croyants qui restent chez eux - sauf ceux qui ont quelque infirmité - et ceux qui luttent corps et biens dans le sentier d'Allah. Allah donne à ceux qui luttent corps et biens un grade d'excellence sur ceux qui restent chez eux. Et à chacun Allah a promis la meilleure récompense; et Allah a mis les combattants au-dessus des non combattants en leur accordant une rétribution immense. (4.95)

- que doit être l'attitude du bon musulman face aux principes démocratiques ?

Si tu obéis à la majorité de ceux qui sont sur la terre, ils t'égareront du sentier d'Allah :
ils ne suivent que la conjecture et ne font que fabriquer des mensonges.
(6.116)

- que doit être l'attitude du bon musulman envers le non-musulman ?

Ils aimeraient vous voir mécréants comme ils ont mécru. Alors vous seriez tous égaux ! Ne prenez donc pas d'alliés parmi eux jusqu'à ce qu'ils émigrent dans le sentier d'Allah. Mais s'ils tournent le dos, saississez-les alors, et tuez-les où que vous les trouviez, et ne prenez parmi eux ni allié ni secoureur. (4.89)

- que doit être l'attitude du bon musulman envers le musulman qui prétend s'intégrer ?

Ne prenez pas pour alliés les Juifs et les Chrétiens. Ils sont alliés les uns des autres. Et celui d'entre vous qui les prend pour alliés devient un des leurs. Allah ne guide certes pas les gens injustes. (5.51)

- quelle est l'opinion de Dieu sur les droits des femmes ?

Les hommes ont autorité sur les femmes en raison des faveurs qu'Allah accorde à ceux-là sur celles-cis, et aussi à cause des dépenses qu'ils font de leurs biens. Les femmes vertueuses sont obéissantes à leurs maris (...) Quand à celles dont vous craignez la désobéissance, exhortez-les, éloignez-vous d'elles dans leurs lits et frappez-les. Si elles arrivent à vous obéir, alors ne cherchez plus de voies contre elles. (4.34)

- et sur les "tournantes" ?

Vos épouses sont pour vous un champ de labour. Allez à votre champ comme et quand vous le voulez. (2.223)

Pour plus d'informations sur l'Islam, lisez Pourquoi je ne suis pas musulman, d'Ibn Warraq, éd. L'Age d'Homme. Vous pouvez aussi vous instruire sur ce site.

 

Géographie

Passons maintenant à la géographie évangélico-martienne (séchée par Decanis) : selon Matthieu, la Terre est plate.

Le diable l'emmène sur une montagne extrêmement haute et lui montre tous les royaumes de l'univers (kosmos) avec leur gloire. (Mt 4.8)

Pour mémoire, Eratosthène avait évalué sa circonférence à 41.710 km vers l'an 500 u.c., quatre siècles avant la rédaction des Evangiles.

Luc semble avoir un doute quant à l'existence d'une telle montagne (quoiqu'elle soit présente dans certains manuscrits) puisqu'il fait monter Satan et Jésus on ne sait où pour contempler d'un seul regard (en stigmh cronou, en un point de temps) tous les royaumes de la terre habitée (oikoumenhs), mais ses doutes ne semble pas porter sur la platitude de la terre (il est vrai qu'elle est affirmée par l'Ancien Testament, comme nous venons de le voir).

Nous retrouvons ici Marcion, pour qui ce Diable est le dieu de l'Ancien Testament (La terre appartient à Dieu et tout ce qu'elle contient. (Ps 24.1) cf Tout cela m'a été remis. (Lc 4.6), Le monde gît au pouvoir du démon (1 Jn 5.19), plus un détail à l'intention des initiés : d'après l'apocryphe juif Oracles sibyllins (4.12), c'est Dieu qui peut tous nous voir "en un point de temps".

Mais voici que le Saint-Esprit vient de me révéler l'emplacement de cette montagne. Matthieu dit "une montagne extrêmement haute" (oros uyhlon lian) et non "la montagne la plus haute" (oros uyhlotatos). Cependant mon NT grec-latin m'indique une variante "in montem altissimum" en Luc 4.5. Donc "oros upselotatos" a pu exister dans un manuscrit grec perdu. Comment cela a-t-il pu s'écrire dans un manuscrit antérieur rédigé en hébreu ? En hébreu, le superlatif se rend avec un génitif : "le roi des rois" = le plus grand des rois ; "le dieu des dieux" = le plus grand des dieux ; le Cantique des cantiques = le plus beau des cantiques ; etc. Et, en hébreu, "montagne" se dit har, et "la montagne des montagnes" se dit donc har ha harot. L'Ararat! Ça vous dit quelquechose ? Pour un évangéliste, quelle montagne pouvait être plus haute que la première à émerger des eaux du Déluge ?

Pourquoi traduire "pinacle" (du Temple) le mot "pterugion" ("petite aile") ? Chouraqui dit "faîte", les TJ "parapet". Mon Bailly dit que pteron, "aile", s'applique à l'architecture : "aile de bâtiment, particulièrement construction en saillie aux deux côtés de la porte principale d'un temple égyptien."

Je n'ai pas retrouvé ce "pterugion" dans le texte grec de l'Ancien Testament. Le Premier Livre des Rois (6.8) dit qu'on accède au sommet du Temple par un portail sis dans son flanc (pleuras).

Autres bugs :

Cette version, couplée à une mise à mort en automne, permettrait à Jésus d'avoir vécu un nombre entier d'années, symbole de perfection soutenu par certains Pères de l'Eglise.
Autre manière de vivre un nombre entier d'années, ou plus exactement une année entière (cf Lc 4.19 : L'Esprit m'a envoyé proclamer une année de grâce.), voire une année cyclique : d'après l'apocryphe pré-chrétien Odes de Salomon, le Sauveur, englouti par sa Passion dans les eaux infernales, en ressort par la source (Aenon) du Jourdain lors de son baptême...

Comme quoi Luc 12.54 ne prouve pas forcément que Selon Luc a été écrit en Italie (thèse très répandue, cf le toit de tuiles, keramon, 5.19).
Inversement, Selon Matthieu, qu'on dit écrit en Judée par un Juif, connaît le tout-à-l'égout romain (Mt 15.17)

Il n'est pas impossible que ce golfe de Tibériade soit sur la côte nord du Liban :

Quittant le territoire de Tyr, [Jésus] vint par Sidon,
vers la mer de Galilée, en plein territoire de la Décapole.
(Mc 7.31)
Car il est écrit dans le Premier Livre des Rois (17.3-9) que le territoire de Sidon est à l'est du Jourdain, et pour les Evangélistes, l'embouchure du Jourdain est sur la côte phénicienne (cf infra).

En réalité, pour aller de Tyr à Sidon, marchez 50 kms vers le nord, en suivant la côte, puis, de Sidon à la Décapole, comptez 140 kms à vol d'oiseau direction SSE.

Marc situe cette Décapole au pays des Girgashites (5.20), alias Geschurites, cananéens selon Matthieu (15.22), ayant survécu aux campagnes de Josué (Jos 13.13), et habitant autour de Sidon (Gn 10.15).

Les Prophètes n'aimaient pas les métropoles maritimes :

Malheur aux habitants de la ligue de la mer! (So 2.5)
Plus moult autres discours du même tonneau dans Ezéchiel (ch. 25-28) et Isaïe (ch 23).
Par conséquent, le dieu Jésus prononce le même genre d'imprécations : Malheur à toi, Chorazaïn! Malheur à toi, Bethsaïde! (Mt 11.21; Lc 10.13) Naturellement, il paraît que ce sont là des bleds situés au bord d'un lac que les Evangélistes n'ont jamais vu, et que l'archéologie ne peut identifier avec sûreté. Mais il est curieux qu'ils portent des noms apparentés à Tyr (Khor, en hébreu) et à Sidon (Beth Sidon, la "maison" de Sidon, sa descendance, cf Gn 10.15)... Matthieu ajoute Sodome (11.23), car elle est située près de la mer Salée (Gn 14.3), mais comme Jéhovah ne lui a pas offert de se convertir avant de la détruire, Luc préfère en supprimer la mention.

Une chose encore plus étrange est que ni Matthieu ni Luc ne mentionnent de passage de Jésus à Chorazaïn avant que celui-ci ne pique sa crise! Matthieu ignore de plus cette Bethsaïde. Luc y loge un miracle de multiplication des pains (9.10), non localisé par Marc (6.32) et Matthieu (14.13), sans nous dire si le peuple fut converti ou non. Si nous gardons Bethsaïde pour ce même miracle dans Matthieu (14.13), nous obtenons des imprécations matthéennes antérieures au miracle! Marc fait guérir un aveugle à Bethsaïde (8.22) avec Jésus lui enjoignant de taire ce miracle... Et les Bethsaïdiens devraient être ensuite coupables de ne point s'être convertis ?

Et face à ces difficultés, l'apologiste Xavier Léon-Dufour se défile...

Notez que cette excursion en bord de mer était inscrite dans les prophéties (Ez 28.20 sq) :

Fils d'homme, tourne ta face vers Sidon (...)
On saura que je suis l'Eternel quand je lui infligerai des châtiments (cf "Malheur à toi" etc)
et que j'y manifestrai ma sainteté (guérison de la Cananéenne).

Opinion de Loisy, monument des études évangéliques :

Loisy n'a-t-il jamais lu les prophètes ? Les évangélistes si :

Le meilleur moyen de ne pas être entendu sur les boulevards n'est-il pas de ne jamais mettre les pieds dans les villes ?

(*) Pais signifie "enfant", plus que "serviteur", et rien ne prouve que les évangélistes aient compris "serviteur". Dans l'épisode du centurion de Capharnahum (Jn 4.46, Mt 8.5, Lc 7.1), Jean parle d'un fils (uios) malade, Matthieu d'un enfant (pais), et Luc d'un esclave (doulos).

Suite des bugs :

Je soupçonne le père Origène d'avoir pioché ses leçons de géographie évangélique à la même source que Jean, à savoir Ezéchiel (ch. 47) où l'on apprend que le Jourdain prend sa source à Jérusalem (Urusalem, "ville de Salem") alias Salem (Gn 14.18), alias Saleim (Eusèbe, Hist. Ecc.), alias Salim, alias Byt Bryt ("maison de l'Alliance", c'est à dire le Temple de Jérusalem; sans doute étymologie de ce gué de Beth Bara, ou bien "maison de la nourriture", beth barah, qui convient tout autant pour désigner le Temple), passant ensuite par l'"Arabah"

La Septante porte Arabian, transcrit ici "Arabah" mais "Arabie" chez Paul (Gal 1.17 & 4.25). Chouraqui écrit "la steppe" et le rabbinat "la plaine".

pour aller se jeter dans la mer, comme n'importe quel fleuve, la Grande Mer (v. 15) vers le nord (v. 17). Car il n'est nulle part écrit dans la Bible que le Jourdain coule du nord au sud (au contraire, Jos 3.16 : ...les eaux d'aval en direction de la mer salée., Ez 47 ne distinguant pas clairement la "mer salée" de la "grande mer"...)

On objectera que Jean le Baptiste prêche dans le désert (selon Matthieu) et que Salem-Jérusalem n'est pas dans le désert. Est-ce bien certain ? Le désert n'est-il pas sur le mont Sion ? s'exclame Justin de Samarie (Dialogue avec Tryphon, § 114) d'après Isaïe (16.1) :

Apostelw ws erpeta epi thn ghn mh petra erhmos esti to oros qugatros Siwn.
Envoyez les reptiles sur la terre par le désert de pierre jusqu'au mont de la fille de Sion.

Ce texte incroyable (car Isaïe dit d'envoyer des moutons et non des serpents...) est celui de la Septante que lisaient les hellénophones, dont Justin et les évangélistes.

Il est vrai qu'on trouve à la limite du désert un autre bled nommé Cadès (Gn 14.7, Dt 1.2, 1.46, Jos 10.41) appelé aussi Source du Jugement (Gn 14.7). Et le fleuve (hebreu : yeor) du jugement (dan), c'est le Jourdain... Il n'est même pas certain qu'Aenon soit autre chose que "le gué de l'Arnon", "au delà (peran) du Jourdain" (Dt 3.8 > cf Jn 1.28), d'où Josué/Jésus partit à la conquête de Canaan (Jos 12.1).

Bref. Tout ceci témoigne d'une carence massive de la science raëlo-élohimique en matière de photographie aérienne.

 

Capharnahum, au 36ème sous-sol

Un autre bled intéressant est Capharnahum (Kafarnaoum). Mais avant d'aller encore gratter dans les couches rédactionnelles des Evangiles, interrogeons Salomon Reinach :

Me voici prévenu : si je trouve quelque chose au bout de mon intuition, j'aurai de la chance...

Nous avons vu que Triple Zéro n'était pas dans la première version des Evangiles, pas plus que Nazareth. Donc le Proto-Marc devait commencer vers le 15ème verset, qui fait une bonne introduction : Les temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est proche. Repentez-vous et croyez à l'Evangile.

Ensuite Jésus recrute quatre proto-disciples : Simon, André, Jacques et Jean. Or, dans Selon Jean, les quatre premiers sont André, Simon, Philippe et Nathanaël. Et je constate que dans la liste donnée en Mc 3.16 (// Mt 10.2, Lc 6.14) les noms de Jacques et Jean s'intercalent entre Pierre et André, que suit le Philippe de Selon Jean (et Barthélemy/Nathanaël, cf infra). Donc, primitivement, Jésus ne recrutait ici que Simon et André. (Dans la suite du texte, seul Simon est actif)

Puis Jésus entre dans Capharnahum avec ces deux-là. Matthieu (4.18 - 8.5) lui offre un tas d'aventures entre ces deux épisodes. Marcion/Luc, trouvant sans doute que Matthieu exagère (ou écrivant avant Matthieu), et ne croyant pas trop à la vocation de Simon, commence par un miracle à la synagogue de Capharnahum (4.31), puis en ajoute un chez Simon (4.38) et un sur le lac (5.7) pour pouvoir ensuite recruter Simon (5.10).

Toujours est-il que la VO dit que Jésus commença sa carrière en pénétrant un jour dans une synagogue où il trouva un démon! Vous avouerez qu'une synagogue est un drôle d'endroit pour loger ce genre de bestiole... Et toutes les synagogues de la Galilée sont peuplées de démons (Mc 1.39)! - Marcion, es-tu là ? - Oui, mon fils...

Mais si, comme on devrait le croire, Jésus est Dieu, alors la synagogue est sa maison (Mc 2.1, où il n'est pas dit que c'est la maison de Simon). Un peu plus loin "la" maison est devenue "sa" maison (2.15). Comme il n'est dit nulle part dans cet évangile que Jésus ait habité à Nazareth (hors le prologue), pourquoi est-il venu commencer sa carrière à Capharnahum ? Parce que ce nom signifie "village de la consolation". Or il est écrit :

Consolez, consolez mon peuple, dit votre dieu.
Parlez au coeur de Jérusalem
Et criez-lui que son temps d'épreuve est fini,
Que son péché est expié,
Qu'elle a reçu de la main du Seigneur double peine pour toutes ses fautes.
Une voix crie : "Dans le désert, déblayez la route pour l'Eternel..."
(Is 40.1-3)
Voici pourquoi Jésus peut commencer sa carrière à Salem/Jérusalem selon Jean, et à Capharnahum selon Marc : c'est le même bled! C'est aussi ce qui permet au paralytique guéri au Temple de Jérusalem selon Jean (5.8) de l'être dans la synagogue de Capharnahum selon les Synoptiques (Mc 2.9 & //). C'est ce qui permet à un fonctionnaire royal (qui devrait donc officier dans la capitale, Jn 4.46) de devenir centurion à Capharnahum (Mt 8.5, Lc 7.2). L'aveugle guérit avec de la salive à Jérusalem selon Jean (9.7) l'est à Bethsaïde selon Marc (8.22). Mais la Bethsaïde de Marc se retrouve sous forme de piscine de Bezatha chez Jean (5.2), nom dont on trouve comme variantes Bethesda dans les manuscrits grecs, Bethsaida en latin, Bethzatha chez les TJ, et Beith Hasda ("maison de grâce") chez Chouraqui.

Si Capharnahum était Jérusalem, on comprend mieux que cette malheureuse ville ait été l'objet des imprécations de Jésus :

Et toi Capharnahum, seras-tu élevée jusqu'au ciel ?
Tu seras descendue aux enfers.
Car si c'était à Sodome qu'avaient eu lieu les miracles opérés chez toi,
elle aurait existé jusqu'à ce jour.
(Mt 11.23)
Pourquoi Jésus en voudrait-il à un bled dont les foules l'ont suivi ? Dans Luc, l'effet "pièce rapportée" est encore pire : ce ne sont que succès et ralliements de foules jusqu'à que Jésus s'en irrite ! Tandis que si ce commentaire a lieu après la résurrection, Jésus a de quoi se plaindre de quelques mauvais traitements à Jérusalem. Et on sait très bien que ces promesses de châtiment ont été suivies d'effet...

Un courant chrétien quelconque a dû faire un rapprochement entre le destin de Jérusalem et celui de Sodome, idée tirée d'une erreur de copiste dans l'Apocalypse (11.9), puis réapparaissant discrètement chez Marc : je trouve que ces deux disciples entrant à Capharnahum en compagnie de Jésus font écho aux deux anges entrant à Sodome en compagnie de Jéhovah (Gn 18-19; présence de Jéhovah dans la ville : 18.21).

On objectera que Jésus n'est pas entré à Capharnahum pour tout détruire. Mais c'est parce qu'il est le dieu bon du Nouveau Testament et non le dieu méchant de l'Ancien. L'évangéliste réécrit donc l'épisode de Sodome avec plus de mansuétude. Quand au démon qui trône dans la synagogue, c'est un docteur de la Loi!

Et ces pêcheurs que Jésus recruta au bord d'une mer près de Capharnahum l'ont peut-être été primitivement le long du Jourdain près de Jérusalem, car il était écrit :

Partout où passera le torrent, tout être vivant qui y fourmille vivra.
Le poisson sera très abondant, car là où cette eau pénètre elle assainit
et la vie se développe partout où va le torrent.
Sur le rivage, il y aura des pêcheurs.
(Ez 47.9-10)
 

Boxif chez les marchands du Temple

Mais à ceux qui voudraient entamer une carrière d'apôtre sans jamais avoir rencontré Jésus, comme, par exemple Paul, Apollos, ou même Céphas (d'après Paul :

je propose de suivre le conseil de l'auteur des Actes (28.23) :

(Paul) rendait témoignage de Jésus en partant de la loi de Moïse et des Prophètes.

Par conséquent, interrogeons les Prophètes :

En ce jour, il y aura une clameur à la porte des Poissons (...) :
tous les changeurs d'argent seront retranchés.
(Sophonie 1.10-11)
En ce jour, il n'y aura plus de marchands (? kananaios)
dans la maison du Seigneur
. (Za 14.21)

D'où il s'ensuit qu'un vrai messie doit chasser les marchands du Temple.

Avec en plus des problèmes de traduction dans la rédaction du scénario :
Le Rabbinat traduit

Faut-il alors que les E.T. lui procurent un bouclier d'invisibilité (Lc 4.30 ; Jn 10.39) lui permettant de tout saccager (Mt 21.12), de beugler des insultes contre les autorités (Mt 23) sans se faire embarquer par la police (Mt 24.1 ; cp Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, I,33.3) ? Inutile, car où est-il question de surveillance policière dans ces prophéties ?

Marc (11.16) ajoute que Jésus s'en prend aux lévites pour satisfaire Malachie (3.3) :
Il purifiera les fils de Lévi afin qu'ils offrent avec piété.
Les autres évangélistes ont sans doute trouvé que prétendre sortir libre d'une castagne avec des prêtres juifs dans l'enceinte du Temple, c'était quand-même invraisemblable...

Nous remarquerons aussi que les Evangiles sont bien avares de détails sur l'architecture de ce temple : Jésus entre et sort du temple, point! A l'intérieur, on trouve le naos des temples grecs (Jn 2.18), mais nul debir, oulam, ou hekal, alors que les Evangiles sont farcis de "Bezatha" et autre "talitha koum" pour faire couleur locale. Quant au "portique de Salomon" (Jn 10.23), il sort tout droit du Premier Livre des Rois (7.6).

Mais de quelle époque date ce verset 23 ? Tertullien écrit : A quoi pensaient ceux qui voulaient nous créer un christianisme stoïcien, platonicien, et dialecticien ? Qu'y a-t-il de commun entre Athènes et Jérusalem ? Notre secte vient du portique de Salomon. (Contra haereses, 7)
Or il ne cite pas Selon Jean. Le contexte ne vise-t-il pas directement le roi Salomon, auquel les Evangiles comparent le Christ (Mt 12.42; Lc 11.32)? Jésus n'a pas prêché que sous ce portique, que je sache, alors comment sa secte en viendrait-elle ? Si Tertullien cite ce portique, c'est pour opposer le Portique d'Athènes (l'école stoïcienne, de stoia, portique) au christianisme. D'où cette trouvaille d'un copiste qui ajoute au texte de Jean, pour faire bonne mesure, que Jésus "allait et venait" (periepatei) à la manière d'Aristote, le "péripatéticien"...

Les Synoptiques sont encore plus flous : Maître, vois! Quelles pierres! Quelles constructions! (Mc 13.1). Pas de traces des plaques d'or qui, selon Flavius Josèphe (Guerre des Juifs, V,5.6), réfléchissaient les rayons du soleil. Par contre, on y trouve des offrandes votives (anaqhmasin, Lc 21.5) comme si l'on était au temple de Delphes ou dans un temple dédié à Sérapis.

Pas de commentaires sur cette anomalie dans Dufour, ni dans Lagrange, ni dans Duquesne, ni dans Klausner, ni dans Strauss. (Et encore moins dans les âneries de Mordillat, Barreau, Potin, etc.)

Reste la piscine aux cinq portiques (Jn 5.2) effectivement retrouvée... dans les couches archéologiques de la Jérusalem d'Hadrien. Car cet ange qui plonge dans la piscine pour rendre l'eau curative ne vient pas de l'Ancien Testament (ou bien j'ai raté un épisode) mais du culte de Sérapis, dieu guérisseur. Car après avoir écrasé la première révolte juive en 70 et rasé Jérusalem, les Romains la reconstruisirent sous Hadrien (117-138) sous le nom d'Aelia Capitolina et y élevèrent un temple à Sérapis (cf Groag, in Real-Encyclopädie der classischen Altertumswissenschaft, volume 13).

Guérisons

Le martien Jésus est célébrissime pour ses guérisons. Même ceux qui veulent le dépouiller de sa divinité lui accordent un pouvoir de thaumaturge.

Dans Jésus, illustre et inconnu, Mordillat et Prieur reprennent les stupides calomnies du Toledot Yeshou ("histoire de Jésus", version talmudique des Evangiles) où Jésus est bâtard de Marie Magdalena et du soldat Panther. La preuve ? Nous ne sommes pas nés de la prostitution (Jn 8.41) Sous-entendu, selon les auteurs : c'est pas comme toi... Or le contexte évangélique montre bien qu'il s'agit de prostitution au sens symbolique c'est à dire d'idolâtrie : Notre père est Abraham (père des croyants selon la Firme, polythéiste selon la Genèse).

Mais ces deux zozos intitulent un chapitre Le rabbi thaumaturge où ils tournent autour du pot, n'osant écrire que Jésus accompli des miracles (de peur de passer pour des naïfs ?), écrivant qu'il est un mauvais Juif s'il en accomplit, survolant l'énorme problème que pose une phrase dans Matthieu et Luc : Si c'est par le doigt de Dieu que j'expulse les démons, alors le Royaume de Dieu est arrivé jusqu'à vous (Lc 11.20). A qui était la Judée avant cela ? A Satan ?

Bref : les miracles ? Mélange d'histoires vraies, vécues par Jésus, vécues par d'autres, pastiches, emprunts, paraboles transformées en récits, catéchèses mises en images, accomplissement d'une prophétie (p. 110). J'adore ce mélange...

Traduisons plus nettement ces messieurs : Nous rejetons tout, mais nous gardons le reste...

A tout prendre, les croyants sont bien plus rigolos. Soit Selon Marc (9.25) :

Or, Jésus voyant qu'un groupe nombreux allait se former,
commanda à l'esprit impur en lui disant :
Esprit muet et sourd, je te l'ordonne, sors de lui et n'y reviens plus.
Et le démon sortit en criant et en agitant convulsivement l'enfant...etc

Commentaire de Xavier Léon-Dufour (Les évangiles et l'histoire de Jésus, p. 340) :

L'événement sous-jacent aux trois recensions est historique dans son ensemble; seul un à-priori philosophique niant le miracle permettrait de le mettre en doute. Précisons : la foule, le père et son enfant épileptique, l'impuissance des disciples, l'apostrophe de Jésus, la demande et l'acte de foi du père, l'exorcisme stupéfiant - voilà une série de détails historiques qui sont globalement affirmés, et sans lesquels l'épisode perdrait toute consistance.

Cette "consistance" a pourtant été éliminée par Matthieu et Luc, et le bon père ne se demande même pas pourquoi... Représentons-nous cette scène "historique" telle qu'elle fut contée devant les foules païennes par de zélés missionnaires :

 

Jésus

Esprit muet et sourd, sors de cet enfant !

 

L'esprit

Comment ?

 

Jésus

Je dis : sors de cet enfant !

 

L'esprit

Comment ? Excuse-moi, mais je suis sourd !

Lassés d'entendre s'esclaffer les païens, Matthieu et Luc supprimèrent ces détails "historiques" et remplacèrent le tout par un vague "Jésus commanda à l'esprit..."

Or ce récit n'est là que pour montrer l'accomplissement d'une prophétie :

Alors s'ouvriront les yeux des aveugles,
Et les oreilles des sourds seront débouchées.
(Is 35.5)

Dans un autre passage de Selon Marc (7.32-33), ce débouchage est pris au sens littéral : comme on demandait à Jésus une imposition des mains, comme à un vulgaire prophète, ce Jéhovah incarné prend le sourd à part et lui enfonce les doigts dans les oreilles, car il était écrit (Ps 40.7) :

Idem pour le paralytique de Capharnahum (Mc 2.1 et //), transporté à Jérusalem chez Jean, et une femme voûtée chez Luc (13.11) :

Notons que Jésus affirme, chez Jean (9.3), que ce n'est pas le péché qui est la cause de cécité de l'aveugle-né, et que nul péché n'est remis au paralytique de Jean, tandis que la scène de Capharnahum expose la thèse contraire...

On trouve, dans Matthieu (12.43 sq) et Luc (11.24 sq), un curieux morceau qui conteste l'efficacité de ces guérisons :

Autrement dit, Jésus n'a jamais guéri personne...

Xavier Léon-Dufour n'ose pas commenter cette trouvaille; Lagrange non plus ; Duquesne(XXX)

 

Un original de Marc en latin ?

 

Chimie

Decanis :

Iéshouah change l'eau en vin (Jn 2.1-12). Illusion ? Pouvoir inconnu ? Signe spirituel symbolique ? Jésus dominant la matière ? Ou projections et créations matérialisées de la pensée ? J'opte pour "projection matérialisée de la prophétie" : Yahvé Sabaot préparera sur ce mont pour tous les peuples un festin d'huiles et de vins vieux. (Isaïe 25.6) Mais comme l'évangéliste se donne la peine de préciser que Marie était présente, ce doit être encore une aventure de la Sagesse : Elle a abattu ses bêtes, préparé son vin, et dressé sa table.
Elle a dépêché ses servantes et proclamé sur les hauteurs de la cité :
Qui est simple ? Qu'il passe par ici! A l'homme insensé elle dit :
Venez manger de mon pain et boire du vin que j'ai préparé
!
(Sg 9.2-5)

Cf : Dites aux invités : Voici que j'ai préparé le repas. Tout est prêt. Venez aux noces.
(Mt 22.4)

Quoi qu'il en soit, "ce mont" est Sion, c'est à dire Jérusalem vers où convergeront les peuples :

Beaucoup viendront d'orient et d'occident pour s'étendre à table dans le Royaume de Dieu (Lc 13.29/Mt 8.11)
NB : "s'étendre à table", cette anthentique parole de Jésus ayant été concue à Rome...
Idem chez Luc (14.8) : Ne te couche pas sur le premier lit.
Lors de la Cène, tous sont "étendus à table" (Lc 22.14, 22.27, Mt 26.20, Jn 13.23)
D'après Isaïe, ce festin aura lieu après la destruction d'une ville que rien n'empêche d'identifier à Jérusalem. Mais si ces noces ont lieu à Cana et non à Jérusalem, c'est que, Jérusalem détruite, le culte anéanti, et la Judée occupée par les Romains, le pays reprend symboliquement le nom qu'il portait au temps des Gentils, Canaan, pays de la Nouvelle Alliance :

J'instituerai mon alliance entre moi et toi, et ta race après toi, de génération en génération, une alliance perpétuelle, pour être ton dieu et celui de ta race après toi.
À toi et à ta race après toi, je donnerai le pays où tu séjournes,
tout le pays de Canaan en possession à perpétuité et je serai votre dieu
. (Gn 17. 7-8)

Ce n'est tout de même pas par hasard que ce vin est offert aux convives le 3ème jour (Jn 2.1), jour de la résurrection du Christ...

Ce bled de Cana est toujours associé aux païens : il est sis en Galilée (Jn 2.1, 4.46, 21.2), "le cercle des nations", et Jésus y guérit un centurion (à Capharnahum selon Lc 7.1 et Mt 8.5, mais c'est le même récit que Jn 4.46 sis à Cana)

Matthieu supprime le miracle pour en faire une parabole (les invités qui ne viennent pas aux noces du fils du roi, 22.1-14). Je me demande si tout l'Evangile n'aurait pas gagné en sagesse à n'être que paraboles, sans le moindre miracle :

Les Juifs réclament des miracles et les Grecs recherchent la sagesse.
Or nous prêchons des sottises pour dérouter les hommes et faire plaisir à Dieu.
(1 Cor 1.22-25, traduction kata pneuma)

Notez que la Sagesse dit :

Venez à moi, vous qui me désirez,
Et rassassiez-vous de mes produits.
Car mon souvenir est plus doux que le miel,
Mon héritage plus doux qu'un rayon de miel.
Ceux qui me mangent auront encore faim,
Ceux qui me boivent auront encore soif
. (Si 24.19-21)

Ce à quoi Jésus répond :

Qui boira de l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif. (Jn 4.14)Autrement dit : Soyez des insensés.

Autre épisode célèbre :

Jésus-Christ dit : qu'on m'apporte
Quelques pains, quelques poissons.
Je les multiplie par millions
Et les Hébreux se réconfortent.
Jésus-Christ a donc - quelle malice! -
Inventé le self-service!
Allélou-alléluia! Allélou-alléluia!
(Jean Yanne, in "Alléluia garanti")

Decanis :

Nous voici à nouveau face à un signe symbolique, à moins qu'il ne s'agisse d'un nouvel exemple de domination sur la matière ? Les quatre évangiles nous parlent d'environ cinq mille hommes ; imaginons une grande exagération...

Traduction : un modèle de synthétiseur bio-protonique portatif d'une capacité de cinq mille repas n'existe que chez les Andromédiens, et Jésus est un Arcturien.

...et réduisons à cinq cent hommes à nourrir avec cinq pains et deux poissons...

[ndc : problème classique posé à l'examen du permis de soucoupe arcturien, chapitre "comment séduire les indigènes"]

Voyons plutôt ce que dit l'Ancien Testament :

Un homme apporta à l'homme de Dieu vingt pains d'orge et du gruau.
Obiwan Ben Elohim dit :
- Donne leur à bouffer!
- Quoi ? Avec que ça pour cent mecs ?
- Vas-y, que j'te dis : y'aura du rab!

(2 Rois 4.42-43, librement traduit par mes soins)

L'agent Jésus étant plus grand que tous les Prophètes, il ne pouvait faire moins qu'Elisée. Dalman (Les itinéraires de Jésus) estime improbable la présence d'herbe dans un désert. Ce fait, qui a dû intriguer plus d'un pèlerin, s'explique par le Psaume 23 :

Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien.
Il me parque sur les prés d'herbe fraîche .
Si Jésus entreprend de nourrir le peuple aussitôt débarqué, c'est que l'événement doit avoir lieu près de la rive : Vers les eaux du repos il me mène. Quant aux sandwiches, ils y sont aussi : Devant moi tu apprêtes une table
face à mes adversaires.

Les adversaires étant les Judéens qui attendaient la foule à Jérusalem pour la Pâque (Jn 6.4) et qui la voient suivre Jésus. Mais comme Jésus est le nouveau Temple (Jn 2.21), il n'y a rien d'étrange à ce qu'elle se dirige vers lui.

Quant aux 5 pains et 2 poissons, il s'agit des 5 livres du Pentateuque, des Prophètes, et des Psaumes.

La première multiplication des pains donne un rab de douze paniers (Mc 6.31 sq, Mt 14.13 sq, Lc 9.10 sq), pour convertir douze tribus, et la seconde (Mc 8.1; Mt 15.32) un rab de sept paniers pour convertir les seules tribus du sud (ou bien les Gentils)...

Or la seconde distribution se situe aux Portes de la Mort (Dalmanoutha) comme nous l'avons vu plus haut. Le problème, c'est que Jésus franchit les eaux (le Styx) pour y aller et pour en revenir. Et c'est dans ce pays de mort qu'il rencontre des Pharisiens (Mc 8.11)! Donc les Juifs sont déjà foutus, tandis qu'il reste un espoir pour les païens qui acceptent le repas aux portes de la mort (spirituelle). Si c'étaient les païens qui erraient définitivement dans les ténèbres, c'est eux que Jésus aurait été voir en bateau et non les Pharisiens. Matthieu préfère appeler cet endroit Magadan, nommé Magdala dans certaines versions, "lieu où l'on élève" (au sens d'élever un enfant), c'est à dire la terre d'Israël (cf quelques versets plus haut, 15.31, la foule glorifiant le Dieu d'Israël, ce que se garde de dire Marc) pour tendre une perche aux Juifs, contre les marcionites.

Est-il possible que le Marc primitif ait contenu la première distribution qui contredit l'enseignement de la seconde en nourrissant les foules à coups de Pentateuque ? Est-il possible qu'ici, il invite les Juifs en faisant asseoir les convives "par carrés de cent et de cinquante", hébraïsme pour dire "par carrés de cent cinquante" (12 x 12) ? Luc ne retient que la version au rab de douze paniers, mais il vire les Juifs à coups de carrés de cinquante (7 x 7)... On sent encore ici les querelles dont les Actes se font déjà l'écho.

Remarquons cependant que la scène se passe dans un lieu désert et que les disciples suggèrent d'envoyer la foule dans les bourgs des environs! Traduction : Ils n'ont pas la Parole. S'ils allaient se nourrir de philosophie grecque et de religions païennes ?

Jésus : Nourrissez-les vous-mêmes!
Traduction : Si je vous envoie parmi les Nations, ce n'est pas pour des prunes!

Les disciples : Nous n'avons que cinq pains et deux poissons!
Traduction : Nous n'avons que le Pentateuque et les Psaumes! Quel païen voudrait avaler ça ?

Et Jésus prenant les cinq pains et les deux poissons, et levant les yeux vers le ciel, il les bénit et les rompit.
Taduction : Donnez-moi ces ouvrages, que je les dépèce pour n'en distribuer que le meilleur.

Et, pour couronner le tout, à la fin du repas, les trois versions balancent les Juifs par dessus bord : Et l'on emporta ce qu'il y avait de trop : douze paniers pleins.

Il existe une autre relation entre le psaume 107 et le psaume 23 : Dussé-je suivre la sombre vallée de la mort, je ne craindrais aucun mal... (23.4, version rabbinat)

Donc, cet épisode-ci ne devait pas être situé très loin de Dalmanoutha...

 

Quand un Martien recrute...

De même, quand on a à combiner la mystique du nombre 7 avec celle du nombre 12, on obtient 12 apôtres nommant 7 diacres (Actes); ou bien on met 6 diacres sous les ordres de chaque apôtre, formant ainsi 12 brigades de 7 membres, le tout faisant 72 apôtres (Lc 10.1, ou 70 selon les versions, les 72 comptant Jésus, alias Moïse, et Pierre, alias Aaron, cf les 70 Anciens d'Israël in Exode 24.1).

(A moins que ces 72 apôtres soient destinés aux 72 nations de Gentils recensées par la Genèse, et dans ce cas, ils n'auraient été recrutés qu'après la Résurrection (cf Mt 28.19 / Mt 10.5) puisqu'ils ne font rien durant la mission terrestre du Christ.)

Le nombre 7 se décomposant lui-même en 5 + 2, et le nombre 12 se décomposant en 7 + 5, vous pouvez vous amuser avec 12, 7, 5, et 2.

Ainsi, dans les Psaumes, 5 + 2 = 7 plaies d'Egypte, devenant 5 x 2 = 10 plaies d'Egypte dans l'Exode.

Quand le héros de l'Evangile finit par se choisir douze apôtres, le rédacteur se réfère aux douze fils de Jacob (Gn 29.31 sq) :

- Siméon signifiant "il a entendu", Simon-Pierre entend l'appel de Jésus; il est dit "fils de Jonas" (Mt 16.17, Jn 1.42, 21.15) parce qu'un Simon ben Jonas était l'architecte du temple de Jérusalem : il s'agit sans doute d'une addition aussi tardive que le "Tu es Pierre" (Mt 16.17, absent des textes parallèles de Marc et Luc) griffonné par un moine à la solde de l'évêque de Rome (car dans le même évangile, Jésus confie le Royaume à tous les apôtres -18.17)
Autre falsification en faveur de la primauté de Pierre (Mt 17.27) : Jésus fait payer son impôt par un poisson, mais un coup de plume ajoute qu'il paye pour Pierre aussi sans donner de second didrachme. Ont-ils été inculpés tous les deux pour fraude fiscale ?
- Lévi signifiant "il s'attachera", Lévi quitte son bureau de percepteur pour s'attacher à Jésus; s'il est percepteur, c'est parce que les lévites et les prêtres sont présentés par les évangélistes comme des crapules ne pensant qu'à percevoir leur dîmes; si ce Lévi s'appelle aussi Matthieu, c'est que ça veut dire "pot de vin" en hébreu (mattanah)...
- Jean représente le prophète Jonas ("colombe"), fils d'Amittaï (2R 14.25), de Gath-Epher, pour la tribu de Zabulon (Jos 19.13). S'il est dit "fils de Zébédée", c'est parce que zeved, "cadeau", vient de la même racine que "Zabulon" (Gn 30.20), tribu habitant en bord de mer (Gn 49.13). Il a un frère nommé Jacob, ce qui est curieux. Mais, parfois, le second fils de Zébédée ne s'appelle pas Jacob (Mt 20.20, 27.56) et ce Jacob baladeur est tantôt père de Judas (Lc 6.16), tantôt fils d'Alphée, tantôt frère de Jésus (Gal 1.19). Pour corser la chose, l'évangile de Luc fait des frères Zeved des associés de Pierre ; Marc et Matthieu, antérieurs, des voisins. Origène (Contre Celse, I, 62) les dit marins et non pêcheurs (le détail du raccommodage des filets n'étant pas dans tous les manuscrits évangéliques; notez qu'il ne dit pas à ces deux-là qu'il en fera des pêcheurs d'hommes). Or les marins sont de la tribu de Dan (Jg 5.17). Donc le second frère Zeved a dû s'appeler Dan ("juger") à une époque lointaine (traces en Mc 10.35, Mt 20.20)...
- Judas signifiant "je rendrai gloire", c'est lui qui sera chargé de livrer Jésus afin que celui-ci soit glorifié par sa résurrection. Le fils de Jacob avait suivi le même parcours en livrant Joseph pour en faire un ministre. Si Judas est dit Iscariote, c'est que SKR, prononcé sakar, signifie "livrer" (autre étymologie possible ShQR = traîtrise).
- la tribu de Joseph est représentée par Jésus lui-même, Josué étant fils de Noun ("poisson", cf le symbole des premiers chrétiens), de la tribu de Joseph, d'où "Jésus fils de Joseph", le Joseph des Evangiles étant inconnu des premiers apologistes chrétiens, cf Justin dans sa première Apologie (32.14) : Il naquit, par la vertu de Dieu, d'une vierge de la race de Jacob, père de Juda, ancêtre des Juifs. Jessé fut aussi, selon les oracles (Is 11.1), un aïeul du Christ.

Justin ne s'est pas cassé la tête à aller fouiller dans les résultats du recensement de Quirinius... Cette définition peut aussi bien faire de Jésus un descendant de David (par Jessé) qu'un membre de la tribu d'Ephraïm, l'appartenance à la race de Jacob n'impliquant pas ici l'appartenance à la branche de Juda, et Marie pouvant descendre de Jessé par sa mère et d'Ephraïm par son père.

Quoique je suis bien généreux de formuler une telle interprétation : si Justin avait voulu nommer Juda, il aurait dit "d'une vierge de la race de Juda, fils de Jacob", sinon pourquoi ne pas remonter jusqu'à Abraham, comme le fait Matthieu ? Et, pour les païens auxquels il s'adresse, les Juifs sont tous ceux qui prétendent descendre de Jacob et non la seule tribu de Juda. Donc la phrase originale était : Il naquit, par la vertu de Dieu, d'une vierge de la race de Jacob, ancêtre des Juifs. Le reste est interpolé.

On trouve dans les Évangiles deux traces de cette non-appartenance de Jésus à la famille de David : une glose sur le psaume 110 (Mc 12.35 et //), et, dans Matthieu (2.18) une lamentation de Jérémie (31.15) sur les tribus issues de Rachel, Joseph et Benjamin (Gn 30.24 & 35.18)

Notez aussi que, dans l'Apocalypse (5.5), le Messie n'est pas un "rejeton", comme on le traduit abusivement, mais un ancêtre de David, une "racine" (riza). Cf Isaïe 11.1 :
Kai exeleusetai rabdos ek ths rizhs Iessai kai anqos ex ths rizhs anabhsetai.
Et sortira un rameau de la racine de Jessé et une pousse de la racine saillira.

Vous allez me dire que si Jésus fait partie des douze apôtres, il y a un bug quelquepart, mais nous avons vu qu'il n'y avait pas de disciples dans le Selon Jean primitif, qu'ils étaient cinq dans un Selon Jean intermédiaire, et 72 dans certains passages des Synoptiques. Alors qu'ils soient passés de douze à treize en rédaction finale...

Et comment les Synoptiques ont-ils recruté les apôtres manquant à Selon Jean ? En les dédoublant! Ainsi, il y a deux Simon et deux Judas. Philippe, fils (bar) de Tholmaï, devient "Philippe et Barthélémy". Et comme cela ne suffit pas, l'ancêtre Jacob est promu disciple en deux exemplaires : Jacques d'Alphée et Jacques de Zébédée... L'insertion tardive de ceux deux là se voit en Mc 3.17 où le "Simon et André" des textes parallèles est coupé par la mention de Jacques et Jean.

Notons aussi que trois versions du recrutement des disciples (aux sources du Jourdain, selon Jean; au bord de la mer de Galilée selon les Synoptiques, sur une montagne inconnue selon les mêmes Synoptiques...), pour des souvenirs d'apôtres, cela en fait deux de trop...

S'il n'y avait que cela d'irréel...

Nous pouvons constater que, dans Marc, cette escapade montagnarde (3.13-19) est assez mal venue. Elle vient donc d'ailleurs. Dans Matthieu (10.1-5), il n'y a pas de montagne, ce qui, pour une imitation de Moïse, est fâcheux. L'original devrait donc venir de Luc. Mais comme Luc s'échine à faire descendre Jésus de la montagne pour prononcer les Béatitudes, on voit mal pourquoi il aurait glissé ce trait mosaïque quelques lignes avant..., d'autant plus que, dans la suite du récit de Luc, Jésus s'adresse à des foules et à des "disciples" distincts de ces Douze (6.17).

On ne sait même pas où cette montagne se trouve. Selon Marc, Jésus venait de guérir une main désséchée dans une synagogue où il était entré "de nouveau" (3.1). Il est donc à Capharnahum (1.21), au bord d'un lac, comme nous l'avons vu.

Après son forfait, Judas s'est-il ouvert le crâne et les tripes accidentellement (Ac 1.18) selon la recette préconisée par le Livre de la Sagesse (4.19) ? Ou fut-il condamné à errer sur la Terre (Gn 4.12), comme l'enseignait Papias de Hiérapolis (cf Mgr Duchesne, Histoire ancienne de l'Eglise) ? A moins qu'il ne se soit pendu (Mt 27.5) à l'instar du traître Ahitofel (2 S 17.23).
Le figuier (of course...) de la pendaison qui fut montré à l'empereur Antonin était à l'est de Jérusalem ; cent ans plus tard, il était à l'ouest; il est aujourd'hui au sud et il est devenu micocoulier... (Dalman, Les itinéraires de Jésus, p. 435)

On est tenté de faire un parallèle avec d'autres vénérables reliques :

On prétend qu'à Argos existe encore l'olivier auquel Argos attacha Io changée en génisse. En Phrygie, on montre le platane auquel fut pendu Marsyas vaincu par Apollon. (Pline, Histoires naturelles, 16.19)

Chose admirable, cette place, où pour la dernière fois se posèrent les pieds divins quand une nuée emporta Jésus vers le ciel, n'a jamais pu être reliée par un pavé avec les autres dallages. La terre impatiente s'est refusée à supporter du travail d'homme, et souvent les marbres furent rejetés au visage des ouvriers. Comme preuve éternelle qu'en ce lieu Dieu foula la poussière, on y voit encore ses traces. Et quoique chaque jour les empreintes soient mises au pillage par la foi des visiteurs qui affluent, le sable ne souffre pas de diminution. Il conserve la même apparence. Les vestiges restent imprimés comme un cachet. (Sulpice Sévère, Chronique, II,33)

Et Philostrate, dans sa Vie d'Apollonius de Tyane, fait passer son héros par le Caucase où on lui montre le rocher où Prométhée fut enchaîné...

 

Quand un Martien enseigne

Si Jésus fut un rabbin ou un révolutionnaire qui a échoué, il faut rejeter comme inauthentiques non seulement les miracles mais aussi les prédictions (ruine du royaume de Judée, conversion des Gentils), l'institution de la Cène, et les paroles relatives à l'organisation de l'Eglise :

Qui s'élève sera abaissé. (Mt 23.12, Lc 14.11) cf Il vaut mieux qu'on te dise "Monte ici!" que d'être abaissé en présence du prince. (Pr 25.7)
Tu es Pierre etc... (Mt 16.18-19) // Ce que vous lierez sur la Terre sera lié dans le Ciel. (Mt 18.18)
Les garçons de noce peuvent-ils jeûner quand l'époux est avec eux ? (Mc 2.19 & //) Il ne faut jeûner que le vendredi et le samedi.
Méfiez-vous des faux prophètes qui viennent à vous.
[vous les disciples, non les Juifs] (Mt 7.15)
Ne donnez pas ce qui est saint aux chiens. (Mt 7.13) : il s'agit du pain de l'eucharistie, d'après la Didachè.
Etc etc...

Que faire du Notre Père, ignoré de Paul, comme de Marc et de Jean, les deux évangiles les plus anciens ?
Et comment le Fils Unique du Père peut-il faire dire Notre Père ? Qu'y-a-t-il de purement chrétien là-dedans ? C'est une prière rabbinique :

Toi, Yahvé, tu es notre père. (Is 63.16)

Notre Père qui es aux cieux

C'est Yahvé que vous proclamerez saint.
(Is 8.13)

Que ton nom soit sanctifié

À Yahvé la royauté! (Ps 22.29)

Que ton règne vienne
(et cependant : Si je chasse les démons par l'Esprit de Dieu, c'est que le règne de Dieu est arrivé. (Mt 12.28)

Heureux l'homme à qui le Seigneur ne compte pas de faute. (Ps 32.2)

Remets-nous nos dettes comme nous les remettons à ceux qui nous les doivent.
(Changé en "remets-nous nos péchés" par Luc pour ne pas indisposer les riches)

 

 

Dire Donne nous notre pain quotidien est une impiété car l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui sort de la bouche de Dieu. (Dt 8.3)

La parole de Dieu est-elle ce pain surnaturel (epiousion) dont parle l'Evangile (mais non ses traductions, y compris celle de 2001 qui massacre la langue française autant que les textes originaux...) ?

Goûtez et voyez comme Dieu est bon. (Ps 34.8)

L'Eternel est mon héritage et ma coupe. (Ps 16.5)

J'ouvris la bouche, et une coupe pleine d'une liqueur liquide comme l'eau,
mais ayant la couleur du feu, me fut présentée. Je la pris et je la bus.
Pendant que je buvais, l'intelligence agitait mon coeur,
la sagesse le remplissait, et ma mémoire fut fortifiée.
(IV Esdras 14.39-41)

Ni les Evangiles, ni l'Epître aux Corinthiens (10.16, 11.25) ne disent que la coupe de la Cène contenait du pinard. Tertullien, dans son Apologétique, ne le dit pas non plus...

L'Evangile des Hébreux demandait notre pain de demain pour une faute de copie, epiaurion au lieu d'epiousion.

Que faire du Sermon sur la Montagne qui fut, selon Luc, un Sermon dans la Plaine (Lc 6.17 : topou pedinou) ? Ou comment mettre du vieux vin dans des outres neuves par la grâce de la double négation :

Ne dites plus

Malheur aux riches! (Is 5.8)

Mais dites

Heureux les pauvres! (et rajoutez discrètement "en esprit" pour plaire aux riches...)

Ne dites plus

Mes serviteurs mangeront et vous aurez faim. (Is 65.13)

Mais dites

Heureux ceux qui ont faim car ils seront rassasiés.

Ne dites plus

Mes serviteurs crieront de joie et vous pousserez des cris de douleur. (Is 65.14)

Mais dites

Heureux ceux qui pleurent car ils seront consolés. (Mt 5.5)

Ou bien dites

Malheur à vous qui riez maintenant car vous serez dans le deuil et les larmes. (Lc 6.25)

Etc etc ...

 

Il faut bien reconnaître que le texte d'Isaïe est plus cohérent que celui des Évangiles : Isaïe ne s'adresse qu'aux justes, aux "serviteurs" (de Dieu), tandis que l'Evangile ne se soucie pas de savoir si ceux qui pleurent et qui ont faim ont mérité leur lot ou non. Au contraire, il va jusqu'à encourager la paresse :

Les oiseaux du ciel ni ne sèment ni ne moissonent et le Père céleste les nourrit. (Mt 6.26)

On peut cependant poser une restriction non négligable : les Béatitudes ne s'adressent qu'au clergé chrétien et le mot "serviteur" est sous-entendu, car Marc (5.1) et Luc (6.20) précisent que Jésus abandonne les foules et prend ses disciples à part pour leur donner cet enseignement.

Michel Corringe, auteur de La route ("La route m'appelle et m'attire...") a dit en fait les même choses dans Les paumés :

Venez à moi, les paumés,
Répétait la même voix,
Venez : je vous guiderai
Là où le malheureux est roi.
Long sera notre chemin,
Nul n'aura droit au repos,
Avant que ne soit édifié
Le nouvel Eldorado...

Pour les autres sentences évangéliques relatives à cet Eldorado pour curés, voir infra.
 

Parenthèse sur les vieux habits et les vieilles outres

Si le Notre Père et les Béatitudes ne se trouvent pas dans Marc, c'est que les premiers chrétiens n'avaient pas encore fait ces emprunts à l'Ancien Testament. Car il est dit

dans une sentence qui, dans les trois évangiles, ne s'accorde ni avec ce qui précède, ni avec ce qui suit, et qui, comble de maladresse, est adressée aux disciples du Baptiste et aux Pharisiens alors qu'il s'agit d'un point de doctrine interne On ne met pas du vin nouveau (l'Evangile) dans de vieilles outres (les Juifs). Et nul, lorsqu'il (les Juifs et les judéo-chrétiens) boit du vin vieux (l'AT) ne veut du nouveau car il dit le vieux est bon. (Lc 5,37-39 et //). On met du vin nouveau dans des outres neuves (les Gentils) et tous deux se conservent. (Mt 9.17)

Pour justifier les emprunts à l'Ancien Testament, un malin a glissé dans Matthieu (13.52) :

Tout scribe devenu disciple du Royaume est semblable a un propriétaire qui tire de son trésor du neuf et du vieux. Ce qui est une permission donnée à tout baptisé versé dans l'Ancien Testament de forger des sentences estampillées ipsissima verba et de les assembler en Evangile selon Lambda.
 

Fin de carrière

Notre martien, après avoir converti les foules, reçu enfin d'Arcturus l'ordre de monter à Jérusalem pour s'y faire sacrer roi d'Israël. Selon des exégètes modernes qui ne croient plus en Dieu, Jésus était donc bien un homme politique. Hyam Maccoby a trouvé que l'expression "fils de Dieu" révélait une prétention de Jésus au trône d'Israël : Rabbi, tu es le fils de Dieu, tu es le roi d'Israël (Jn 1.49). Car Jéhovah, par la bouche du prophète Nathan, avait dit du roi David : Je serai pour lui un père et il sera pour moi un fils. (2 S 7.14). Selon les élucubrations de Messieurs Mordillat et Prieur (Jésus contre Jésus), il était un zélote de la bande à Barabbas. Selon celles de J.C. Barreau (Biographie de Jésus), il fut trahi par les zélotes dont il avait refusé de prendre le commandement pour marcher sur Jérusalem (Jn 6.15)

Donc Jésus arrive à Jérusalem en passant par Jéricho, ceci afin que s'accomplisse les prophéties :

Le Saron deviendra une pâture de brebis,
le val d'Akor un pacage pour ceux qui m'auront cherché
.(Is 65.10)
Je ferai du val d'Akor une porte d'espérance.(Os 2.17)
Ensuite, il arrive à Bethphagé ("maison du figuier") pour déssécher un figuier, selon le voeu d'Osée. Et je suis bien gentil de mettre le scénario dans cet ordre-là car, dans Marc et Matthieu, Jésus ressort de Jérusalem après son accueil triomphal pour aller déssécher le figuier... Puis à il passe à Bethanie ("maison de l'olivier") pour être aspergé d'huile parfumée : Tu parfumes d'huile ma tête. (Ps 23.5)

(Marc et Matthieu font verser l'huile sur la tête de Jésus, mais Jean profite de cet épisode pour humilier une Marie qui est sans doute la mère du Christ puisqu'il n'y en a pas d'autre dans son évangile...

Notons le détail invraisemblable de l'essuyage des pieds de Jésus, car cette pécheresse aurait dû s'être coupé les cheveux en signe de repentance...)

Ici interviennent malencontreusement les disciples (et non le seul Judas, selon Marc et Matthieu; il y a même un pluriel en Jn 12.8 qui contredit le verset 4) :
- C'est du gaspillage! On aurait pu donner la valeur de ce parfum aux pauvres!
- Vous croyez au Grand Soir, ou quoi ? Des pauvres, il y en aura toujours!
- Mais patron, vous avez dit qu'il valait mieux donner des sous aux pauvres qu'au Temple!
- J'ai dit ça, moi ? Dans quel apocryphe ?
- Dans Marc (7.11) et dans Matthieu (15.5)
- Vous ne comprenez jamais rien : les "pauvres", c'est les curés! Ce n'est qu'ainsi que le Royaume peut leur appartenir. Vous arriverez chez les gens les mains vides et vous y resterez jusqu'à qu'ils vous foutent dehors (Mc 6.8-10 et //). En guise de prêche, dites n'importe quoi : plus ce sera abscons, mieux ça passera! (Mc 13.11 et //) Et s'ils refusent de payer, faites-les crever! (Ac 5.1-11) C'est pour cela que je vous dis qu'à plumer les gogos en mon nom en leur prêchant le mépris des richesses (Mc 10.23 et //), vous gagnerez des millions! (Mc 10.30 et //) Et si des malins essayent les mêmes combines, traitez-les de faux prophètes! (Mc 13.22 et //)

Puis Jésus entre tromphalement à Jérusalem (Is 62.11; Ps 118.26), monté à la fois sur une ânesse et sur son ânon, selon Matthieu (21.7), prétendu disciple juif qui ne saisit pas que cette formule de Zacharie (9.9)

Voici que ton roi vient à toi, juste et victorieux,
Humble, monté sur un âne et sur le petit d'une ânesse.
est un sémitisme (cf les exemples cités au chapitre
Retour sur les Fils de Dieu)

Justin de Samarie (Première Apologie, § 32) précise que cet ânon était attaché à un cep de vigne car il était écrit :

Selon Matthieu, la foule crie "Hosanna au fils de David!". Voici une foule juive qui ne sait pas qu'Hosanna signifie "daigne sauver" et doit être suivi d'un accusatif : Hosanna le fils de David!

Ensuite, toute cette foule est renvoyée en coulisses. Jésus chasse alors les marchands du Temple à coup de fouet (qui a dit Heureux les doux car il posséderont la Terre ?), et comme cela n'émeut ni les marchands ni les flics, il s'assied, bourre sa pipe, et se met à prêcher aux foules, selon Marc et Luc, ou à papoter avec ses disciples, selon Matthieu.

Les Juifs se disent alors :

- Serait-ce un homme politique ? Interrogeons-le sur son programme.
- Du calme : il se pourrait qu'il s'agisse de Dieu en personne !
- Ne dis pas de bêtise : un Juif ne peut pas diviniser un autre Juif !
- Cependant, je vais m'adresser à lui comme s'il était Dieu.

Ils s'approchent de Jésus (Mc 12.14 ; Mt 22.16 ; Lc 20.21) :

- Maître ?
- Oui ?
- Nous savons que tu enseignes les pauvres pécheurs que nous sommes avec droiture (Ps 25.8) alors que tout homme est menteur (Ps 115.11) et que tu ne prends pas les faces (Dt 10.17) : par conséquent, tu es Dieu.
- Bien raisonné, mon pote ! Je peux même ajouter qu'en tant que Dieu, je suis plus grand que Salomon (Mt 12.42) quoique Papa lui ait dit que nul ne sera plus grand que lui (1 R 3.12). Quant à "prendre les faces", où as-tu trouvé ce charabia ?
- Dans Selon Luc, pardi! Ou lambaneis ("tu ne prends pas") est une mauvaise copie des Septante qui écrivent ou qaumazei proswpon ("il ne s'étonne pas une face"), guère plus compréhensible pour un Grec, je l'admets...
- Mon serviteur Luc aura voulu faire couleur locale...
- En ignorant l'hébreu ? C'est plutôt raté...
- Crois-tu que le Grec de base connaisse l'hébreu ? En vérité, je te le dis, dans la suite des âges, il se trouvera des gens pour dire que les évangélistes étaient des reporters et des ignorants pour affirmer que je n'étais pas un dieu...
- Penseront-ils pouvoir défendre la cause de Dieu par des propos mensongers (cf Job 13.7) ?
- Bien sûr, car il est écrit : Le simple croit tout ce qu'on dit. (Pr 14.15) Mais revenons à nos disputes...
- Est-il permis de juger autrui ?
- Race perverse et adultère! Sépulcres blanchis! Guides aveugles! (Mt 23) En vérité, je vous le dis : ne jugez pas afin de ne pas être jugés ! (Mt 7.1) Moi, je ne juge personne. (Jn 8.15)
- Est-il permis de divorcer ?
- Non (Mc 10.9 ; Mt 19.9) Mais vous pouvez avoir jusqu'à dix femmes (Mt 25.1) à condition de vous couper les burnes (Mt 19.12) afin d'hériter d'un nom éternel (Is 56.4).
- Est-il permis de payer l'impôt à César ?
- Comment ? Vous me mettez à l'épreuve, hypocrites ? Alors qu'il est interdit de tenter Dieu (Dt 6.16) ? Bande d'insensés (Mt 23.17 ; Lc 11.40)! Je vous le dis : qui traitera autrui d'insensé sera passible de l'enfer (Mt 5.22)! Et maintenant, montrez-moi un denier. De qui porte-t-il l'effigie ?
- Mais il n'y a pas d'effigie : comme c'est interdit par la Loi et que les Romains ne veulent pas d'émeutes, on ne trouve pas ce genre de pièces à Jérusalem...
- Bon! On dirait que c'est une pièce à l'effigie de César, d'accord ?
- Si tu veux...
- Et bien, il faut rendre à César ce qui est César et à Dieu ce qui est à Dieu. Voilà!
- Mais patron, intervient Judas, n'est-il pas écrit : La terre appartient à Dieu et tout ce qu'elle contient. (Ps 24.1)?
- Et alors ? Est-ce incompatible ? Cette sentence sent bon la laïcité, mais en vérité je vous le dis, l'initié comprend bien que, face à nous, César n'aura que nib et que laïcité et tolérance vont en prendre un coup ces vingts prochains siècles...
- Puisqu'on en est à la théologie, dit un Sadducéen, les morts ressuscitent-ils ?
- Jéhovah n'a-t-il pas dit à Moïse qu'il était "le dieu d'Abraham, d'Isaac, et de Jacob" ? C'est donc un dieu de vivants, non ?
- Abraham, Isaac, et Jacob étaient encore vivants au temps de Moïse ? demanda Judas. C'est un enseignement nouveau, maître...
- Judas, encore une réflexion comme ça et je te...
- A propos, dit un pharisien, ton entrée de tout à l'heure, les jambes écartées entre une ânesse et son ânon, ce serait-y pas une prétention à la royauté, des fois ? T'es fils de David, toi ?
- Le Messie serait fils de David ? Je me gausse! N'est-il pas écrit :

"Le Seigneur parle à mon Seigneur :
Siège à ma droite jusqu'à ce je mette
tes ennemis sous tes pieds."

Si David l'appelle "Seigneur", comment est-il son fils ?
- Je sais, patron, dit Judas : d'après la Loi, le sceptre appartient à Juda (Gn 49.10), mais le culte relève de Lévi (Dt 18.7).
Donc David, de Juda, ne peut réciter ses psaumes à Jéhovah. Aussi les confie-t-il à Asaph, de Lévi (l Ch 16.6).
Mais Asaph ne peut dire "Siège à ma droite" puisqu'il n'est pas Jéhovah.
Aussi fait-il précéder la récitation du poème de David d'un "le Seigneur (Jéhovah) dit à mon Seigneur (David) : Siège à ma droite etc."
Ce qui fait que ce passage ne prouve pas que le Messie n'est pas fils de David. Et voilà! Qu'est-ce que je gagne ?
- Mon poing sur la gueule si tu ne la ferme pas!
- Rassurez-vous, patron! dirent Pierre, Matthieu, et Jean. Nous n'avons rien entendu... D'autant plus qu'il est écrit : Qui s'avise de discuter avec Dieu ne trouve pas à répondre une fois sur mille (Job 9.3) Par conséquent, notre rapport portera : Et personne ne pouvait rien lui répondre et, de ce jour, plus personne n'osa plus l'interroger. (Mt 22.46)
- Et regardez moi ces pharisiens assis sur la chaire de Moïse qui se donnent du "Monseigneur" et défilent dans leur papamobile! Qui lient des fardeaux sur vos épaules (Mt 23.4 / Is 1.14) en inventant sans cesse de nouveaux dogmes, en condamnant la pilule et la fivette, tout en n'étant pas fichus de travailler ni d'élever une famille!
- Hum, dit Pierre, je n'ai rien entendu...
- Jérusalem! Que de fois ai-je voulu réunir tes enfants comme une poule réunit ses poussins sous ses ailes!
- Ca y est! dirent les pharisiens. Il se prend pour Dieu! (Ps 57.1)
- Oui, je vous le dis : le Ciel et la Terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas!
- Comme c'est original! dirent les pharisiens. L'herbe et la fleur se flétriront mais la parole de Dieu durera toujours. (Is 40.8) Il se croit vraiment sorti de la cuisse de Jupiter, si j'ose dire...
- Mais, patron, dit Judas, c'est une arnaque : si les justes doivent hériter de la terre (Ps 37.29) et que celle-ci passe, pourquoi être juste ?
- Rassure-toi, mon gars, dit un pharisien, car il est écrit qu'"une génération s'en va, une autre lui succède, mais la terre subsiste perpétuellement". (Qo 1.4)
- Vous avez raison, dans le fond,... Alors, écoutez mes paroles : Le ciel et la terre passeront mais aucun trait de la Loi ne passera! (Mt 5.18) Cependant, cette Loi, vous pouvez vous la caler où je pense! Car s'il vous a été dit Honnore ton père et ta mère, moi je vous dis N'appelez personne "mon père" (Mt 23.9), et Si quelqu'un vient à moi sans haïr son père, sa mère, et sa famille, il ne peut être mon disciple. (Lc 14.26) Et comme il vous a été dit Tu ne tueras pas, moi je vous dis Qu'on égorge ceux qui ne veulent pas que je règne sur eux! (Lc 19.27) Et je vous appelle à être tolérants envers moi car Qui n'est pas contre nous est avec nous (Mc 9.38; Lc 9.50). Quant à mon Eglise, je l'autorise à profiter de votre tolérance pour imposer son intolérance car, en vérité je vous le dis, Qui n'est pas avec moi est contre moi. (Mt 12.30; Lc 11.23)
Et en vérité, je vous le dis :
Ce n'est pas quiconque me dit "Seigneur! Seigneur!" qui entrera dans le Royaume mais celui qui fait la volonté de mon Père. (Mt 7.21)
Car c'est d'après tes paroles que tu seras déclaré juste et d'après tes paroles que tu seras condamné. (Mt 12.37)
Et écoutez ma sagesse :
Heureux les artisans de paix, (Mt 5.9)
Mais je ne suis pas venu apporter la paix mais le glaive
. (Mt 10.34)
Et ceux qui prennent le glaive périssent par le glaive. (Mt 26.52/Jr 15.2)
Et que celui qui n'a pas de glaive vende son manteau et en achète un. (Lc 22.36)

Les Pharisiens (à part) : - Dis, Judas... Tu sais qu'au gymnase des Grecs une bonne douche ne coûte que 30 deniers ?

Sectes, mensonges, et idéaux

Mais laissons la parole à l'apologiste Claude Tresmontant (Le Christ hébreu) :

Dans le cas des Evangiles, s'il y a unité dans la doctrine, dans la pensée, jusqu'au niveau moléculaire (sic!), c'est qu'il y a unité à la source de l'information. Ce ne sont pas des églises multiples qui sécrètent des Evangiles. Ce sont des églises multiples qui reçoivent le même message. (p. 206)

Cette notion de transformation littéraire suppose que les chrétiens [...] se sont permis de toucher, de retoucher, de tripoter, de malaxer, d'ajouter ou d'ôter selon les cas, bref de transformer les paroles du Seigneur. Cela paraît évident et ne semble pas présenter de difficulté pour une mentalité de canailles ou de fraudeurs comme la nôtre au XIXème et au XXème siècles. Mais il n'est pas évident du tout, ni certain que les chrétiens de la première ou de la deuxième génération aient été de ce type. (p. 65)

Alléluia ! Interrogons maintenant Saint Jérôme, chrétien d'une énième génération (+ 420) :

Il y a autant de versions que d'exemplaires [des évangiles] : chacun a ajouté ou retranché ce que bon lui semblait. (in Commentaire sur Josué)

Et, pour ne pas perdre de si bonnes habitudes, Saint Jérôme en fit autant dans sa traduction latine de la Bible grecque des Septante, version latine dite Vulgate. Son contemporain Rufin d'Aquilée, continuateur de l'Histoire Ecclésiastique d'Eusèbe de Césarée, l'accusa alors d'être un faussaire. Puis Rufin à son tour commit un Symbole qu'il attribua aux Apôtres...

Eusèbe de Césarée, pour sa part, retoucha Flavius Josèphe, rédigea une Vie de Constantin, flagornerie qui lui valu le titre de "plus grand menteur de tous les temps" (Reinach), et une Préparation Evangélique dont un chapitre s'intitule Jusqu'où il est permis de mentir pour amener à la conversion ce que cette méthode peut convaincre...(Par indulgence pour elle-même, l'Eglise n'a pas rangé le mensonge parmi les Sept Péchés Capitaux).

Et je vous offre cette autre perle qui nous montre ce que les apologistes modernes entendent par "vérité" : Cette histoire d'un évangile hébreu de Matthieu découvert aux Indes est trop invraisemblable pour n'être pas véridique.
(Carmignac, La naissance des évangiles synoptiques, p.65)

Comme disait l'autre : Il n'y a rien de nouveau sous le soleil. (Qo 1.10)
 

Retour sur Flavius Josèphe

Puisque nous en sommes aux mensonges, occupons-nous des "témoignages profanes" sur Jésus de Nazareth.

Le plus célèbre est sans conteste le Testimonium flavianum que la presse nous ressort à chaque Noël (hors-série du Nouvel Obs', Historia, Science et Vie, etc) quoique sa fausseté soit démontrée depuis trois cent ans. Mais comme il n'y a pas de raison que les apologistes d'aujourd'hui soient moins menteurs que ceux d'hier, on le trouve encore chez Dunkerley (Le Christ, 1957), Duquesne (Jésus, 1994) et tout récemment chez Jacques Perrier, évêque de Tarbes et de Lourdes (Jésus, 15 questions à l'Eglise, Oct 2002). Le cas de Mordillat et Prieur est légèrement différent : pour que Jésus ne soit qu'un fils de pute qui a raté son coup d'état, il faut au moins qu'il ait existé...

Autre attitude : Maurice Goguel (Jésus de Nazareth, mythe ou histoire ?, Payot, 1925) reconnaît que Josèphe ne parle nulle part de Jésus ni des chrétiens, mais c'est seulement que Josèphe n'en pouvait parler sans exposer le judaïsme à l'accusation d'une compromettante solidarité avec un mouvement dangereux, odieux aux classes dirigeantes. Ainsi Josèphe peut défendre le judaïsme contre les calomnies d'un Grec (Contre Apion), décrire la guerre de Judée du point de vue du vaincu, écrire les Antiquités juives pour prouver au vainqueur la grandeur des rebelles, mais il se serait "compromis" en parlant d'un prophète qui prêchait de rendre à César ce qui lui appartenait et aux pauvres d'amasser des trésors dans le Ciel ? Sottises!

Je ne vais pas ici énumérer tous les autres menteurs qui avalisent ce faux.

(01.05.03) Mais je suis tombé sur pire que ceux-là. Un certain Justin Taylor, "prêtre mariste", ayant commis un D'où vient le christianisme ?, fait appel au témoignage du Josèphe slave (ie vieux russe), version de la Guerre des Juifs comportant moult interpolations chrétiennes (le Testimonium courant interpolant les Antiquités juives) dont une reprise du Testimonium étudié ci-après, avec encore plus d'emphase (exemple : Alors parut un homme, s'il est permis de l'appeler homme. Sa nature et son extérieur étaient d'un homme, mais son apparence plus qu'humaine et ses oeuvres divines... etc.). Josèphe écrit qu'une inscription sur le parvis des Gentils leur enjoint de ne pas aller au delà sous peine de mort (BJ, V, 194). Le texte slave ajoute : Et au-dessus de ces inscriptions, une quatrième était accrochée dans les mêmes caractères, désignant Jésus, roi n'ayant pas régné, crucifié par les Juifs parce qu'il annonçait la ruine de la ville et la désolation du Temple. Comme si une telle inscription avait pu porter crucifié par les Juifs, comme si les Juifs étaient des étrangers au Temple, et comme s'ils pratiquaient la crucifixion! Un autre passage (après V, 214) parle du voile du Temple déchiré lors de la mort de Jésus. Or, nous avons vu que cet événement n'était pas plus historique que le reste.

On reproche à Voltaire d'avoir eu une vision simpliste de la religion en la disant créée par des fourbes pour exploiter les imbéciles. Ces modernes apologistes lui donnent raison...

Mais revenons au texte.

Au livre XVII Antiquités juives, on lit ceci :

Puis :

Ginetai de kata touton ton cronon IhsouV
sofoV aner,
[ei ge andra auton legein crh hn,]
gar paradoxwn ergwn poihthV.
Vers cette époque paraît Jésus,
homme sage
si toutefois il faut l'appeler homme
car merveilleux travaux faiseur.
DidaskaloV anqrwpwn
twn hdonh [talhqh] decomenwn,
kai pollouV men IoudaiouV pollouV de kai tou Ellhnikou ephgageto.
Il enseignait les hommes
qui reçoivent la vérité avec plaisir
et beaucoup de Juifs et beaucoup venus de l'hellénisme il entraîna à sa suite .
[O cristoV outoV hn,]
kai auton endeixei twn prwtwn andrwn par hmin
staurw epitetimhkotoV Pilaton,
ouk epausanto oi to prwton agaphsanteV.
Celui-là était le Christ.
Lorsque, sur la dénonciation des principaux membres de notre nation,
Pilate l'eut condamné à la croix, ne furent abandonnés de lui les premiers à l'avoir aimé.
Ejanh gar autoiV trithn ecwn hmeran palin zwn Il leur apparut le troisième jour de nouveau vivant,
twn qeiwn profhtwn tauta te kai alla muria peri auton qaumasia eirhkotwn eiV comme les divins prophètes et autres dix mille merveilles à son sujet avaient annonçé.
eti te nun twn Cristianwn apo toude wnomasmenon ouk epelipe to fulon. Encore maintenant les Chrétiens d'après lui nommés n'a pas disparu le groupe.

Et enfin :

Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour s'apercevoir que les passages précédant et suivant le morceau sur Jésus s'emboîtent parfaitement.

Autre cartouche des apologistes modernes : la "recension courte" de l'évêque Agapios datant du Xième siècle d'où sont absents quelques mots trop apologétiques que j'ai mis entre [ ] dans le texte grec. Cet expédient me fait penser à un tableau hollandais du XVème siècle représentant une scène de village qui fut jugé faux par un quidam ayant remarqué un dindon dans la basse-cour, animal introduit en Europe au XVIème siècle... Pensez-vous qu'on puisse sauver l'authenticité du tableau en ne révoquant que ce dindon ? A-t-il été simplement rajouté par un collectionneur zélé ?

Mais enfin, racourcir Josèphe en ôtant tout ce qui sort directement des Evangiles, pourquoi pas ?

Vers cette époque paraît Jésus, Alors apparut Jésus venant de Galilée...
(Mt 3.13 / Mc 1.9)
[cp Ginetai (Josèphe), paraginetai (Mt), egeneto (Mc)]
homme sage L'enfant grandissait et se fortifiait en se remplissant de sagesse. (Lc 2.40)
si toutefois il faut l'appeler homme
car merveilleux travaux faiseur
Pour l'identité entre Jésus et Dieu, voir plus haut. Pour les miracles, voir partout...
Il enseignait les hommes qui reçoivent la vérité avec plaisir Celui qui a été semé sur la pierre, c'est celui qui entend la parole et aussitôt la reçoit avec joie.
(Mt 13.20 et //, parabole du Semeur)
et beaucoup de Juifs et beaucoup venus de l'hellénisme il entraîna à sa suite . Il y avait là quelques Grecs [...] et firent [à Philippe] cette demande : Seigneur, nous voulons voir Jésus. (Jn 12.20-21)
Celui-là était le Christ. Tu es le Christ! (Mc 8.29 et //)
Lorsque, sur la dénonciation des principaux membres de notre nation, Nous avons trouvé cet homme mettant le désordre dans notre nation. (Lc 23.2)
Pilate l'eut condamné à la croix, Alors, il le leur livra pour qu'il fut crucifié. (Jn 19.16)
ne furent abandonnés les premiers à l'avoir aimé. Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers son père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'à la fin. (Jn 13.1)
Il leur apparut le troisième jour de nouveau vivant, Voyez mes mains et mes pieds, c'est bien moi. Tâtez-moi et voyez qu'un esprit n'a pas de chair et d'os comme vous constatez que j'en ai. (Lc 24.39)
comme les divins prophètes avaient annonçé. Et, commençant par Moïse, et par tous les prophètes, il leur interpréta ce qui le concernait dans toutes les Ecritures.
(Lc 24.27)
et autres dix mille merveilles à son sujet. Il y a beaucoup d'autres choses que Jésus a faites. Si on les écrivait une à une, je ne sais si le monde lui-même pourrait contenir les livres qui en seraient écrits. (Jn 21.25)
les Chrétiens d'après lui nommés C'est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de chrétiens. (Ac 11.26)
Encore maintenant les Chrétiens d'après lui nommés n'a pas disparu le groupe. Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde. (Mt 28.20)

Moralité : si tu croises Duquesne, Mgr Perrier, Mordillat, ou Prieur, giffle-les! Maintenant, tu sais pourquoi et eux le savaient déjà...

Le choeur : Objection! Pourquoi rejeter comme anhistoriques des morceaux de littérature profane sous prétexte qu'ils ont été fabriqués par des chrétiens ? Les Evangiles aussi ont été fabriqués par des chrétiens!

Alors là, Messieurs, je suis entièrement d'accord....

 

Les frères de Jésus

Octobre 2002 : les médias nous font un tapage à propos d'un sarcophage portant l'inscription : Jacques, fils de Joseph, frère de Jésus. (C'est un recyclage d'une information disponible dans Science et vie n°945, Juin 1996). En fait, l'inscription portait Y'KWBBRYWSF, "Yakoub bar Yousef", et un marchand d'antiquités a rajouté 'KWW YSHW', "akou Yeshoua", pour valoriser sa trouvaille... Voir l'article dans Jewsweek.

Les rationalistes et les protestants veulent bien que Jésus ait eu des frères. Les orthodoxes les logent comme enfants d'un premier mariage de Joseph. Les catholiques les font cousins à la mode de Judée.

Ici encore, Flavius Josèphe a été convoqué contre son gré. Dans son livre vingtième de la Guerre des Juifs, il rapporte que les autorités politiques faisaient et défaisaient les grands-prêtres :

Le roi Agrippa donna la grande sacrificature à Ismaël, fils de Phabée, et les souverains sacrificateurs entrèrent alors en contestation. (§ 6)

Le roi Agrippa donna ensuite la grande sacrificature à Joseph, surnommé Caby, fils de Simon, grand sacrificateur. (§ 7)

Festus étant mort, Néron donna le gouvernement de la Judée à Albinus, et le roi Agrippa ôta la grande sacrificature à Joseph pour la donner à Ananus, fils d'Ananus. Cet Ananus, le père, a été considéré comme l'un des plus heureux hommes du monde car il jouit autant qu'il voulut de cette grande dignité et eut cinq fils qui la possédèrent tous après lui, ce qui n'est arrivé à nul autre. Ananus, l'un d'eux, dont nous parlons maintenant, était un homme audacieux et entreprennant, et la secte des Saducéens qui, comme nous l'avons dit, sont les plus sévères de tous les Juifs et les plus rigoureux dans leurs jugements.
Il prit le temps de la mort de Festus et qu'Albinus n'était pas encore arrivé pour assembler un conseil devant lequel il fit venir Jacques, frère de Jésus, nommé Christ, et quelques autres, les accusa d'avoir contrevenu à la loi et les fit condamner à être lapidés.
Cette action déplut extrêmement à tous ceux des habitants de Jérusalem qui avaient de la piété et un véritable amour pour l'observation de nos lois. Ils députèrent secrètement vers le roi Agrippa pour le prier de mander à Ananus de n'entreprendre plus rien de semblable, ce qu'il avait fait ne pouvant être excusé. Quelques-uns d'entre eux allèrent au devant d'Albinus, qui était alors parti d'Alexandrie, pour l'imformer de ce qui s'était passé et lui représenter qu'Ananus n'avait pu, ni dû assembler ce conseil sans sa permission. Il entra dans ce sentiment et écrivit à Ananus avec colère et avec menaces de le faire châtier. Agrippa, le voyant si irrité contre lui, lui ôta la grande sacrificature qu'il n'avait exercée que quatre mois et la donna à Jésus, fils de Damnéus.
(§ 8)

Ce Jésus dit le Christ suppose l'existence de l'autre passage interpolé. Il lui est donc postérieur.

Et voyez le style de Josèphe : il ne nomme jamais "messie" ou "christ" les divers agitateurs messianiques dont il parle (Theudas, l'Egyptien, etc) mais dit : Un prophète du nom de.... Pour présenter ses personnages, il dit "Untel fils d'Untel". Ce Jacques, dont la fonction n'est pas définie, pouvait bien être le frère d'un Jésus, mais alors ce Jésus aurait dû être appelé "fils de Joseph", s'il s'était agit de celui des Evangiles. Ce n'est pas le cas. Mais nous lisons un peu plus loin que, pour réparer cette faute, Agrippa confie la sacrificature à Jésus fils de Damnéus. Il est donc infiniment probable que ce Jacques ait aussi été fils de Damnéus, et que ce "nommé le Christ" ait été récrit sur un grattage de "fils de Damnéus".

Enfin, il faut n'avoir jamais lu la Bible pour croire qu'un Jacques officiant au Temple de Jérusalem, et à ce titre membre de la tribu de Lévi, ait pu avoir comme frère un Jésus issu de David et donc membre de la tibu de Juda... Si l'on fait des frères de Jésus des fils de Marie nés après lui, pour qu'elle engendre un Lévite, il faut que Joseph meurre et qu'elle se remarie. Ensuite, pour qu'un lévite né d'un second lit dans une obscure bourgade de Galilée coiffe sur le poteau toute l'aristocratie saducéenne, il faut une succession de miracles...

Si encore ce Jacques chrétien avait une biographie crédible.

Nous commençons par trouver deux Jacques incrustés en Mc 3.17 (cf supra). L'un d'entre eux serait-il le "frère" de Mc 6.3 : [Jésus n'est-il pas] le frère de Jacques, de Joseph, de Judas, et de Simon ? Non, car l'évangéliste ajoute que ces quatre-là ne croyaient pas en lui : Et ils se scandalisaient à sont sujet.

Pour Maccoby, ce frère Jacques est un frère naturel qui hérite des prétentions de Jésus au trône de David : Jacques est le chef et Pierre le grand vizir. Mais dans les Actes, lors de la Pentecôte, on ne trouve que deux Jacques recevant le don des langues. Hérode en fait décoller un (Ac 12.1), puis un autre succède à Pierre (12.17) : quid de ce "frère Jacques" qui aurait hérité d'une autorité sur l'Eglise sans jamais avoir cru en Jésus ni avoir reçu l'Esprit-Saint ?

Chez Paul, ce "frère du Seigneur" est hiérarque à Jérusalem (Gal 1.19) et témoin de la résurrection du Christ (1 Co 15.7), ce dernier point n'étant dans aucun évangile.

Dans les Constitutions Apostoliques, "frère du Seigneur" est un titre donné à tous les martyrs.

Dans mon Dictionnaire des Saints, je trouve un "Jacques le Majeur", fils de Zébédée, victime d'Hérode, et un "Jacques le Mineur", "cousin" de Jésus. Eusèbe, d'après Hégésippe, évêque de Jérusalem au second siècle (H. E., 2.23), prétend qu'il mourut en martyr chrétien, précipité du haut du Temple. C'est inconciliable avec Josèphe. Selon Epiphane (Haer., 78.14), c'était en 62 et il avait alors 96 ans. Né en -34, il ne pouvait donc être le frère de Jésus par Marie, ni son cousin par une soeur de celle-ci. Au mieux, Epiphane suit la version du vieux Joseph et de ses deux mariages.

Dans la Légende Dorée, Jacques de Voragine envoie l'apôtre Jacques évangéliser l'Espagne. Après n'avoir fait que neuf disciples, celui-ci décide de retourner en Judée. Là, il polémique contre Hermogène et son disciple Philétus. Philétus est converti, ce qui irrite Hermogène, lequel recrute des diables pour se venger, avant d'être lui-même converti. Cela irrite les Juifs et le pontife Abiathar (un nom trouvé en 1 R 1.7), lequel défère Jacques devant Hérode Agrippa qui le fait décoller. Ses disciples mettent son corps dans une nef sans gouvernail et un ange les conduit jusqu'en Galice, au royaume de la reine Louve, qui avait refusé de se convertir du vivant de Jacques. La Reine conseille à cet équipage de prendre un chemin qu'elle sait barré par un dragon. Etc...

Mais cette tradition de d'un apostolat hispanique de Saint Jacques n'est pas antérieure au IXème siècle, et les noms de ses prétendus disciples n'apparaissent qu'au XIème siècle...

Mais enfin, ce qui nous intéresse ici est un argument des évhéméristes : Jamais les évangélistes n'auraient imaginé de doter Jésus de frères, dont l'Eglise a eu tant de mal à se débarasser, si cela n'avait pas eu une base historique.

Une base prophétique n'aurait-elle pas suffit ?

Bénédictions sur la tête de Joseph, le nazaréen d'entre ses frères. (Gn 49.26) D'où le Nazaréen et ses frères. Et pourquoi ses frères le rejettent-ils ? Je suis devenu un étranger pour mes frères,
Un inconnu pour les fils de ma mère.
(Ps 69.9)
En plus la prophétie tranche la question de la virginité perpétuelle de Marie : il ne pouvait s'agir que de frères utérins. Par contre, elle ne dit pas si la rupture avec les frères est à l'initiative du Messie ou des frères. D'où la présence des deux thèses : - Ils se scandalisaient à sont sujet. (Mc 6.3, Mt 13.56)
- Qui sont ma mère et mes frères ? Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique. (Lc 8.21, Mc 3.35, Mt 12.50)
Et Luc, dont la spécialité est de corriger ses prédécesseurs, a tranché dans le sens d'une initiative de Dieu le Fils : c'est bien le seul endroit des évangiles où on lui laisse de l'initiative...

Autre remarque à propos de cette doctrine de la vigninité perpétuelle de Marie, ante partum, in partum, post partum : d'un point de vue catholique, c'est une hérésie, malgré l'autorité des Pères et des Conciles. Car cette trouvaille vient des docètes : leur Jésus immatériel pouvait traverser un hymen sans difficulté ; pour un Jésus de chair, c'est plus compliqué...

 

Le lieu de la Cène

On a beaucoup discuté sur la date de la Cène et peu sur l'emplacement du Cénacle. Sans doute, cela n'intéressait que les pèlerins. Eux sont fixés depuis le VIIème siècle : dans la même salle a eu lieu la Cène, la Pentecôte, et la Dormition de Marie.

Il est vrai que, pour ceux qui lisent trop vite, l'Evangile ne précise pas son emplacement.

Mais, alors que je relisais la description du Temple dans le Premier Livre des Chroniques (ch 28) et dans Ezéchiel (ch 41 & 42), où sont décrits plusieurs étages de chambres, l'Esprit du Seigneur descendit sur moi et me dit : TILT !

Et je me souvins que ce repas avait eu lieu dans une chambre à l'étage (anagaion , litt : "hors sol"). Le choeur : Des chambres d'en haut, il y en a dans toutes les maisons du coin!

Hommes de peu de foi ! Ecoutez Ezéchiel (42.13) : Et il me dit : Les salles du nord, les salles du sud qui font face au préau, ce sont les salles saintes où les pontifes qui s'approchent de l'Eternel doivent consommer les offrandes éminemment saintes.

Y a-t-il un repas plus saint que la Cène ? Non! Par conséquent, c'est dans le Temple et pas ailleurs qu'a été mangé l'Agneau de Dieu. D'ailleurs, c'est dans le Temple que se trouvent l'Agneau et ses apôtres dans le tableau précédent.

Autres indices :

- Allez en ville et vous rencontrerez un homme portant une cruche d'eau. Suivez-le.

Lu chez je ne sais plus qui (Rops ?) : C'est un code pour un rendez-vous secret car, au Proche-Orient, ce sont les femmes qui portent les cruches et non les hommes.

Mais il ne s'agit pas de porter la cruche sur la tête (ferw) mais à bout de bras (bastazw) : il s'agit donc d'une procession comme celle décrivant le transfert de l'Arche d'Alliance dans le Temple (1 R 8 ; Ps 68.24), et comme l'Arche contenait l'Ancienne Alliance, la cruche contient l'eau de la Nouvelle Alliance.

- pourquoi mentionner la présence de tapis (Mc 14.15, Lc 22.12) alors que le repas de Pâque doit se prendre debout (Ex 12.11) ? Serait-ce que ces "tapis" (estrwmenon) proviennent d'une copie défectueuse du texte des Septantes où le "préau" du texte d'Ezéchiel se dit diasthmatwn ("placé en travers"), d'où dia-stromatwn ("avec des tapis placés en travers") ? Ou d'une copie latine avec stratum (tapis) pour separatum (Ez 42.13, vulgate) ? Ce ne serait pas pire que de trouver dans les Actes une synagogue des libertinon (Ac 6.9), mot qu'on traduit "des affranchis" d'après le latin libertinus, alors que "des affranchis" se dit en grec apeleuqerikos, tandis que libustinon veut dire "des Libyens", ce qui expliquerait que cette synagogue regroupe Cyrénéens et Alexandrins...

 

Procès

Les ouvrages sur le procès de Jésus sont innombrables.

L'un des plus sérieux dit ceci :

Le récit évangélique de l'arrestation, du procès, et de la condamnation de Jésus fourmille d'impossibilités, d'invraisemblances, d'incohérences : considéré du point de vue juridique, il est inintelligible. On ne se tire pas d'affaire en proclamant que toutes les formes du droit et de la justice ont été violées; que Jésus n'a pas été jugé mais assassiné, que Pilate l'a envoyé à la mort par une aberration monstrueuse et dans un coup de peur.
Il faudrait d'abord expliquer pourquoi il en a été ainsi, et on ne le fait pas; on ne peut pas le faire. L'erreur de toutes les hypothèses bienveillantes à la véracité de nos textes, c'est de supposer préjudiciellement cette véracité et d'y croire, c'est de traiter comme matière d'histoire ce qui n'est qu'illustration d'hagiographie au service d'un thèse d'apologétique.

Charles Guignebert, Jésus

Donc, si ce récit est incohérent du point de vue du droit, c'est que Jésus n'était pas un aventurier mais le Messie annoncé par les Prophètes.

Or, le prophète Zacharie l'avait convoqué au Mont des Oliviers

Ce jour-là, ses pieds se poseront sur le mont des Oliviers (Za 14.4)en un lieu appelé "pressoir" (Gethsémani, Za 14.10/Mc 14.32).

Ensuite, il entre en agonie, comme l'avait prédit le psaume 42 :

Qu'as tu mon âme à défaillir et à gémir sur moi ?Puis il a une crise d'hématidrose (sueur de sang, Lc 22.44) pour satisfaire Isaïe : Il a répandu son âme jusqu'à la mort. (53.12, version des Septante)
(Car l'âme de la chair est dans le sang, Lv 17.11)
Puis il est arrêté et ses disciples l'abandonnent car il était écrit : Je frapperai le pasteur et les brebis seront dispersées. (Za 13.7)Marc a, paraît-il laissé "un souvenir personnel" dans son oeuvre : un jeune homme s'enfuit tout nu (14.51). JC Barreau (p 152) : C'était certainement lui, sinon qui d'autre ? Le récit est signé!Mais aucun historien de l'Eglise n'a jamais fait de Marc un témoin de la vie de Jésus. Il serait plus sage d'interroger le prophète Amos (2.16) : En ce jour-là, le plus brave s'enfuira tout nu.

Ensuite Isaïe (50.6) livre le Messie aux outrages :

J'ai tendu le dos à ceux qui me frappaient et les joues à ceux qui m'arrachaient la barbe;
je n'ai pas soustrait ma face aux outrages et aux crachats.
Ici, lorsque Jésus reçoit une giffle, (Amos 4.14 : Ils frappent à la joue le juge d'Israël), il oublie de tendre l'autre joue (Mt 5.39; Lc 6.29), bug qui n'a pas échappé à Luc qui remplace les soufflets par des coups (puisque l'Evangile ne dit pas ce qu'il faut tendre dans ce cas là)... A propos de cette doctrine de non-résistance (que l'Eglise s'est bien gardée d'appliquer...), Confucius avait dit plus sagement : Si tu rends le mal pour le bien, que rendras-tu pour le bien ? ; et Lao-Tseu : Paie le mal avec la justice et la bonté avec la bonté. Ensuite, on fait déposer contre lui des témoins dont les dires ne concordent pas afin de s'assurer la nullité des témoignages et de garantir l'innocence de l'accusé.

Puis on le traduit devant Pilate qui s'avise de l'interroger : Es-tu le Roi des Juifs ?

 

Liturgie

 

Traduction

Jésus

Dis-tu cela de toi-même ou d'autres te l'ont dit de moi ?
(Jn 18.33)

 

Ô représentant de la Gentilité,
sais-tu cela par révélation ou as-tu lu les Écritures ?

Pilate

Tes grands prêtres t'ont livré à moi. Qu'as tu fait ?

 

Vois! Ta nation t'apostasie, toi la source d'eau vive ! Quelles sont tes oeuvres ?

Jésus

Ma royauté n'est pas de ce monde.

 

Les cieux racontent la gloire de Dieu,
et le firmament proclame l'oeuvre de ses mains.
(Ps 19.2)

Pilate

Alors tu es roi ?

 

Alors, tu es Dieu ?

Jésus

Tu l'as dit! Quiconque procède de la vérité écoute ma voix.

 

Oui. Si vous entendez ma voix, n'endurcissez pas vos coeurs. (Ps 95.7)

Pilate

Qu'est-ce que la vérité ?

 

La sagesse se laisse trouver par ceux qui la cherchent. (Sg 6.12)

 

Ici, les traducteurs débloquent. Il n'est pas écrit : Et disant cela, Pilate sortit de nouveau vers les Juifs. (Jn 18.38), mais : Et disant cela de nouveau, Pilate sortit vers les Juifs. , car, chez Jean, le mot palin ("de nouveau") se place toujours après le verbe qu'il qualifie. Donc Pilate a demandé deux fois ce qu'était la vérité, mais il n'a pas eu de réponse soit qu'il ait parlé une fois de trop alors que la source d'eau vive ne doit être sollicitée qu'une fois (cf Moïse et sa baguette), soit qu'il eut dû poser la question trois fois pour faire plus évangélique (cf Pierre, son reniement et son pardon).

Ensuite, Pilate déclare à peu près : J'ai examiné l'agneau de Dieu et je l'ai trouvé sans la moindre tache.

La foule

C'est parfait! L'agneau pascal est bon pour le sacrifice!

Pilate

Je vais donc le libérer...

La foule

Saboteur! Si tu ne respectes pas les coutumes juives, tu es un ennemi de César!

Pilate

Alors considérons l'agneau comme un bouc. Amenez moi un autre bouc identique au premier.

L'huissier

Voici Jésus Bar Abbas ("fils du père"), un brigand chargé de tous les péchés d'Israël.

Pilate

Dois-je libérer Jésus Bar Abbas le brigand ou Jésus fils du Père Eternel ?

La foule
 

Nous avons une Loi et elle dit qu'il faut envoyer au désert le bouc chargé des péchés d'Israël (Lv 16.21) et sacrifier devant la tente l'autre bouc en rémission de nos péchés (Lv 16.15).

Caïphe

Il est bon qu'un homme meure pour racheter les péchés du peuple. (Jn 18.44)

L'huissier

Pardon! Il est écrit : Celui qui a péché contre moi, c'est lui que j'effacerai de mon livre. (Ex 32.33)

Caïphe

Oui, mais il s'agit ici de l'agneau de Dieu et non d'un pékin quelconque.

Pilate

Parfait. Et maintenant, en tant que prêtre juif...

L'huissier

N'en faites pas trop!...

Pilate

... je proclame que nos mains n'ont pas versé ce sang. (Dt 21.6)

La foule

Que le sang de la Nouvelle Alliance soit sur nous et sur nos enfants. (Ex 24.8)

L'huissier

Alléluia!

Pilate

Et maintenant j'écris : Celui-ci est le roi des Juifs.

Caïphe

Ça ne va pas, non ?

Pilate
 

Espèce d'impie! Seul Dieu est le roi d'Israël! (Is 44.6; So 3.15) Donc, en tant que païen, je symbolise l'accueil des Gentils fait au christianisme, et il me faut reconnaître ainsi Jésus pour Dieu !

Caïphe

Et tu crois qu'Hérode appréciera que tu le crucifies en effigie ?

Pilate

Hérode ? Rien à cirer! Ici, je ne fais pas de politique mais de la liturgie!

Caïphe

Ah ouais ? Ajoute "Mektoub!" tant que tu y es!

Pilate

Ça, c'est une bonne idée! Oyez, foules : Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit!

Le prévenu

Père, pardonne leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font!

Pilate et Caïphe

Mais pas du tout! Nous savons très bien ce que nous faisons!
 

Exécution

Selon le Talmud, Jésus aurait été lapidé puis pendu pour suivre le droit juif. Selon les exégètes cités plus haut, la crucifixion étant un supplice romain, il s'agit d'une exécution politique. Selon les Evangiles, il s'agit de l'accomplissement des prophéties. Il n'y plus qu'à plonger dans un Evangile rédigé plusieurs générations avant JC :

Les crachats

J'ai exposé mon dos à ceux qui me frappaient. Je n'ai point soustrait mon visage aux crachats. (Is 50.6)

Les larrons

Il a été compté parmi les malfaiteurs. (Is 53.12)

Le partage des vêtements

Ils partagent entre eux mes habits et tirent au sort mon vêtement.
(Ps 22.19)

Les insultes
 

Tous ceux qui me voient me bafouent. Leur bouche ricane. Ils hochent la tête.  "Il s'est remis à Yahvé : qu'il le délivre puisqu'il est son ami!" (Ps 22.8-9)

Les ténèbres

Il adviendra ce jour-là que je ferai coucher le soleil en plein midi. (Amos 8.9)

Le vinaigre (1)

Ils m'ont donné à manger du fiel. Dans ma soif, il m'ont abreuvé de vinaigre. (Ps 69.22)

Le voile du Temple

Frappe le linteau et que les seuils s'ébranlent. (Amos 9.1 ; erreur de copiste : hébreu KPTR = linteau, PRKT = voile)

Les morts sortant des tombeaux

Vous saurez que je suis Yahvé lorsque j'ouvrirai vos tombeaux et que je vous en ferai remonter. (Ez 37.13 / Mt 27.52)

La contrition des Juifs

Et le pays se lamentera clan par clan. (Za 12.12 / Lc 23.48)

Le coup de lance

Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé. (Za 12.10)

Les jambes non brisées

On ne lui brisera pas un os. (Ex 12.46)

Le tombeau du riche

On lui a donné un sépulcre avec les impies et sa tombe est avec le riche. (Is 53.9)

(1) Il y a deux épisodes où l'on sert à boire à Jésus, dont l'un se situe avant l'exécution (Mc 15.23 / Mt 27.34, où Matthieu lui sert le fiel du Ps 69) car il était écrit :

Donnez de la liqueur au malheureux. (Pr 31.6)
(Vulgate : à celui qui va mourir.)
Mais Jésus ne voulut pas en boire (Mc 15.23, Mt 27.34) car il était écrit : Ne buvez ni vin ni liqueur quand vous entrez dans la Tente de Réunion. (Lv 10.9)

À propos du voile du Temple, on trouve dans les trois Evangiles "le rideau du Temple se fendit", escisqh, verbe qui correspond au linteau, naturellement, "se déchirer" se disant "regnumai"; mais, avec une curieuse unanimité toutes les traductions donnent "se déchirer"...

(01.05.03) À propos des ténèbres du Golgotha, des "rationalistes", ignorant le penchant des évangélistes pour les prophéties, vous brandissent une éclipse parfaitement naturelle en négligeant le fait que la Pâque a lieu à la pleine lune et qu'une éclipse ne peut avoir lieu qu'à la nouvelle lune.

Je lis dans un opus d'Hugues de Nanteuil (Sur les dates de naissance et de mort de Jésus, ed. Téqui, 1988) que Phégon de Tralles aurait écrit : La quatrième année de la 202ème olympiade, il y eu une éclipse si extraordinaire qu'on n'en avait jamais vue de semblable auparavant. À la sixième heure du jour, la nuit fut telle qu'on voyait les étoiles.
Où l'auteur a-t-il pris ce texte ? Il ne s'est même pas aperçu qu'il avait l'heure mais non le mois ni le jour : c'est grotesque. Une note nous dit qu'Hugues de Nanteuil a commis un autre ouvrage intitulé Les Ténèbres du Vendredi Saint où cette éclipse aurait été due à une météorite géante! Selon les Evangiles, les ténèbres ont duré trois heures (Mc 15.33 & //). La lune ayant un diamètre de 30 secondes d'arc, une éclipse dure 1/720ème de lunaison, soit 29,5/720 jours, soit une heure (dont 7 mn d'éclipse totale). Quant à la durée du passage d'une météorite...
Par contre, si une soucoupe de dix kilomètres de diamètre a flotté au dessus de Jérusalem ce jour-là... (fin add.)

Parenthèse sur les clous : ils sur tous les crucifix mais non dans le texte de la Passion (Ils apparaissent après la résurrection lorsque Jésus dis à Thomas : Mets tes doigts dans mes trous.).
La prophétie avait bien dit : Ils ont percé mes mains et mes pieds. (Ps 22.17)
Ce verset est célèbre pour avoir été tordu dans tous les sens afin de le retirer des prophéties annonçant le triste sort du Messie. Les Juifs actuels traduisent Comme un lion mes mains et mes pieds, suivis par les Témoins de Jéhovah.

Plus curieusement, les TOB récentes leur emboîtent le pas : Comme pour déchiqueter mes mains et mes pieds. (Bible de Jérusalem, 1979).

Encore pire : Attention à mes mains et à mes pieds (La Bible, nouvelle traduction, 2001)

Le problème vient de ce les voyelles de l'alphabet hébreu sont faites de points (sauf le A et les semi-voyelles Y et W), ce qui facilite les erreurs de copie, d'où :
ka ari = comme (un) lion ; karu = ils ont percé ; "attention" = (take) care, sans doute...


Arguments de Bossuet contre ce genre de traduction :

1- "Comme un lion mes mains et mes pieds", cela ne veut rien dire !
2- Justin, dans son Dialogue avec Tryphon, reproche aux Juifs d'avoir corrompu le texte en plusieurs endroits.
[ex : Dialogue, § 84, sur Isaïe 7.14]
Or, il ne dit rien à propos de ce passage. Ce qui prouve qu'à son époque, les Juifs le lisaient comme nous.
3- Plusieurs siècles avant JC, les Septante ont ainsi traduit le texte original : était-ce pour favoriser le christianisme ?

Il faut reconnaître que c'est bien raisonné.
 

Le Golgotha

On nous raconte que Jésus fut exécuté hors des murs de Jérusalem. D'après les textes, ce n'est absolument pas évident.

L'Epître aux Hébreux, plus ancien que les Évangiles, nous dit (13.12) :

Nous avons un autel dont les desservants de la tente n'ont pas le droit de se nourrir.
Car ces animaux dont est porté le sang pour les péchés dans le sanctuaire par le grand prêtre ont leur corps brûlé hors du camp. C'est pourquoi Jésus, pour sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte
(pulhs).
Ce texte ne dit pas que cette porte est celle de Jérusalem plutôt qu'une porte de l'enceinte du Temple ou d'un bâtiment du Temple. Et nos évangiles canoniques ne nous disent pas que les restes de Jésus aient été brûlés. Provenant de l'agneau pascal, ils ont dû être enterrés sur place (Ex 12.46 / Jn 19.41-42).

Les Evangiles ne disent pas non plus que Jésus condamné ait franchi les portes de Jérusalem.

Les évangélistes ne savent pas où réside Pilate : la forteresse Antonia n'apparaît pas dans le texte. Ils ignorent qu'Hérode avait innové en divisant l'esplanade en parvis des Juifs, parvis des femmes, et parvis des Gentils : Jésus ne rencontre ni femme ni Gentil dans le Temple. Inversement, il y trouve des aveugles et des boiteux qui n'y ont pas accès (cf 2 S 5.8).

Dans mon Nouvel Obs' (hors série n° 35, déc 98) sur Jésus et dans Historia thématique n° 64 (mars 2000), je trouve un plan de "Jérusalem au temps de Jésus" où seuls le Temple, l'Antonia, et le palais d'Hérode sont situés de manière identique. Le palais de Caïphe se promène d'un quartier à l'autre. On découvre un temple romain au centre de la ville, près de la résidence du grand prêtre Anne (!... Nouvel Obs'), et un cirque dans Historia. Il y a même un hippodrome qui voltige du nord au sud de la ville... Le Nouvel Obs' nous colle un itinéraire de Jésus et des gardes zigzagant à travers la ville, en pleine nuit de Pâque, où chacun était chez soi à manger l'agneau en famille.

Mais ces "érudits" oublient que les évangélistes ne disent pas si Caïphe réside ailleurs que dans le Temple. Pourquoi diraient-ils cela, d'ailleurs ? Dans quel coin de la Bible trouvez-vous des prêtres résidant hors du Temple ? Le livre d'Ezéchiel, qui décrit le Temple (ch 40 & sq), ne donne guère l'impression que le personnel du Temple puisse résider à l'extérieur de ses murs...

La Bible dit que Gethsemani est près de la tour d'Hananel (Za 14.10), laquelle est près de la porte de l'Angle, laquelle n'est pas loin du Temple, puisqu'en faisant un trou dedans on tombe sur les trésors du Temple (2 R 14.13-14).

Les évangélistes en déduisent donc que Jésus, capturé à Gethsémani, se retrouve dès le tableau suivant aux mains des autorités juives. Pour Marc, Matthieu, et Jean, Jésus se retrouve "devant" (pros, et non "chez") le Grand Prêtre. Seul Luc précise que Jésus est introduit dans "la maison (oikian) du Grand Prêtre", sans que cela prouve que nous ne sommes pas dans le Temple.

Evidemment, on objectera que le païen Pilate n'a rien à faire dans le Temple. Mais justement : quel est ce "prétoire" qui n'apparaît que dans la scène du couronnement d'épines chez Marc et Matthieu, qui est ignoré de Luc, et qui n'est résidence (?) de Pilate que dans Jean ?

Ce Pilate qui fait des allées et venues entre l'intérieur du Prétoire et la cour où l'attend la foule, ce Pilate qui accomplit un rite juif de purification, libère un homme chargé de péchés tout en condamnant un innocent, ressemble furieusement à un prêtre du Lévitique (ch. 16).

Lorsque les Juifs refusent d'entrer dans le Prétoire, est-ce vraiment pour ne pas se souiller (Jn 18.28) ou bien parce que c'est interdit par le Lévitique ?

Aucun autre homme [que le Grand Prêtre] ne devra se trouver dans la Tente de Réunion depuis l'instant où il entrera pour faire l'expiation dans le sanctuaire jusqu'à ce qu'il en sorte. (Lv 16.17)Malgré les beaux tableaux que nous sert le cinéma, si l'on scrute les Évangiles on ne trouve personne d'autre que Pilate et l'agneau Jésus dans la salle où ce dernier est interrogé...

La scène du couronnement d'épines est après le jugement de Pilate selon Marc et Matthieu, avant selon Jean. Mais c'est secondaire.

Ce qui me frappe davantage, c'est que Jésus se retrouve sur le Golgotha juste après le jugement de Pilate. Matthieu réquisitionne Simon de Cyrène sur le trajet mais ne va pas loin non plus (27.32). C'est Luc qui convoque le plus de monde (23.26-31), mais il ne songe pas à indiquer un trajet plus long.

Mais Jean donne un curieux détail : Pilate rend son jugement en un lieu appelé Gabbatha (Jn 19.13), que l'évangile traduit par lithostrotos, "dallage". Mais mon lexique d'araméen traduit gabbatha par "partie chauve au sommet de la tête" (Dalman, Aram.-neuhebr. handwörterbuch). En quoi ce Gabbatha est-il tellement différent du Golgotha ? Il y a bien un lithostrotos sur le parvis du Temple, près de l'autel des holocaustes (2 Ch 7.3), mais ce n'est pas l'éminence que sous-entend le mot gabbatha.

Or Ezéchiel (43.15) désigne l'autel situé sur le parvis comme harel, "la montagne de Dieu".

Si nous revenons en arrière, nous constatons que, lors de l'entrée de Jésus à Jérusalem, le psaume 118 n'est pas intégralement cité :

Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur [...]
Liez la victime aux cornes de l'autel.
Donc le cortège s'achève sur le parvis du Temple où est l'autel. Ensuite, Jésus est ligoté (Mc 15.1, Mt 27.2). Aaron/Pilate lui scrute les taches, l'égorge sur le parvis du Temple, puis lance à la foule : Voici le sang de l'Alliance! (Ex 24.8)Et la foule répond : Son sang sur nous et sur nos enfants! (Mt 27.25)

La traduction erronée de Louis Segond (Que son sang retombe sur nous et nos enfants!) transforme une formule de bénédiction en formule de malédiction.

Et c'est ainsi que Dieu mourut pour abolir l'ancienne Alliance et en fonder une nouvelle : La où il y a alliance, la mort de l'allié est nécessaire.
Une [nouvelle] alliance n'a aucune valeur tant que vit [l'ancien] allié.
(Hb 9.16-17)
Le choeur : C'est ridicule! Comment pouvez-vous identifier l'exécution d'un rabbin galiléen avec la mise à mort d'un dieu universel ? La mort du Dieu de l'Alliance serait un drame cosmique! Ce serait le décret d'abolition de la Loi! Ah... C'est ben vrai, ça!.....
 

Le disciple que Jésus aimait

La Sagesse réapparaît lors de la Passion :

Jésus, voyant sa mère et, tout près, le disciple qu'il préférait, dit à sa mère :
"Femme, voilà ton fils."
Ensuite, il dit au disciple : "Voilà ta mère."
Et, depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui.
(Jn 19.26-27)

Car il est écrit :

La Sagesse élève ses enfants et prend soin de ceux qui la cherchent.
Celui qui l'aime aime la vie, ceux qui la cherchent dès le matin seront remplis de joie.
Celui qui la possède héritera de la gloire; où il porte ses pas, le Seigneur le bénit.
(Siracide 4.11-13)

Or, qui est "le disciple que Jésus aimait" ? L'apôtre Jean! répond la Firme.

Dans ma constance, j'y chercherais plutôt un personnage symbolique comme les autres.

Nous avons quelques clés :

Si je veux qu'il demeure jusqu'à ce que je vienne, que t'importe ? (Jn 21.22)

Il peut s'agir de l'Eglise, au sens originel d'ensemble des fidèles.

Ce disciple était connu du grand Prêtre. (Jn 18.15)
C'est ce disciple qui rend témoignage de ces choses et qui les a écrites,
et nous savons que son témoignage est vrai.
(Jn 21.24)

Il n'y qu'une personne qui puisse se prendre elle-même à témoin : Dieu

Je te jure par moi-même... (Gn 22.16)

Ce qui permet à ce disciple d'être par ailleurs connu du Grand Prêtre, présent dès le début du récit sans jamais avoir été recruté, et disponible jusqu'à la fin des temps.

NB : la Parousie n'est pas la fin des temps mais la "présence" de Jésus (para-ousia) : Je suis avec vous jusqu'à la fin des temps. (Mt 28.20)

 

Marie de Magdala, mère de Jésus

Mais observons de plus près ces quelques mots :

La Sagesse élève ses enfants.

En hébreu, "élever" au sens d'"éduquer" se dit "gadal". Le M de Ma-gadal est un participe : "qui éduque", d'où "Marie de Magdala". Mais des Juifs qui voulaient dénigrer les chrétiens en ont fait "Marie la coiffeuse" (plus exactement "la friseuse", MGLL, d'après la racine GLL,"rouler"), engrossée par un certain Panthère, nom tiré de Pan Thora, Jésus s'affirmant comme étant à lui seul "toute la Loi" (XXX).

En réponse, de même qu'ils ont récupéré le Simon de Cyrène inventé par les docètes, les chrétiens (ceux qui ne comprenaient pas l'hébreu) en feront une autre compagne de Jésus, une Marie-la-pécheresse, pour pouvoir rétorquer : Ah! Mais vous confondez Marie et Marie Madeleine!

Comme cela ne semblait pas suffire, des Pères de l'Église récupérèrent aussi le nom de Panther pour le loger loin de Marie. Saint Épiphane en fait le père de Joseph (Heresiae, § 78), et Saint Jean Damascène un aïeul de Marie (De la foi, liv. IV, ch.15)...

Preuves de cette hypothèse :

- si Selon Jean est bien l'évangile le plus ancien, il est normal qu'il ne connaisse qu'une seule Marie, Marie qui s'appelle parfois "de Magdala" - évidemment - mais qui n'est jamais en compagnie d'une autre Marie...
On m'objectera Jn 19.25 où Lagrange découvre quatre femmes au pied de la croix. D'abord, il n'y en a que deux, "Marie de Clopas et Marie de Magdala", d'abord définies puis nommées. Mais cela sent l'interpolation : comment aurait-on deux soeurs portant le même prénom ? Et pourquoi Jésus ne s'adresse-t-il qu'à l'une d'entre elles ? Pourquoi le disciple ne prendrait que l'une d'elles chez lui ? Jésus aurait-il dit à l'autre : Et toi, maintenant, tu te dém... avec la police ? Pourquoi Jésus l'appellerait-il "Mère" si sa mère n'est pas Marie de Magdala ? Sa mère serait alors la femme de Clopas ? Première nouvelle ! Et ce Clopas, nul ne sait qui il est. (Luc le promènera du côté d'Emmaüs sous le nom de Cléophas)

- dans Selon Marc, second en ancienneté, on trouve (non plus au pied de la croix mais "à distance", 15.40) Marie de Magdala, Marie de Jacques et de José, et Salomé. Lagrange croit que Salomé est la mère des fils de Zébédée, parce que Matthieu, sans lui donner de nom, l'invite (d'après Marc) sur le Golgotha.. L'Eglise prétendant que Jacques et José, frères de Jésus (demi-frères selon le Protoévangile de Jacques), ne sont que ses cousins, où serait passée la mère de Jésus si elle n'est pas Marie de Magdala ? Et Luc, qui n'y comprend plus rien, tâche de s'en tirer avec "des femmes qui l'avaient suivi depuis la Galilée..." (23.49)

Mais comme aucun évangile synoptique n'affirme que les frères de Jésus sont ses cousins, il faudrait bien qu'ici Marie de Jacques soit Marie de Jésus.

Vous remarquerez que, de ce groupe du Golgotha, seules deux femmes se retrouvent au tombeau (le vendredi) : Marie de Magdala et "l'autre Marie", les seules qui comptent. Mais il serait bien improbable qu'un évangéliste mette la mère de Jésus en seconde position derrière une pécheresse, eux qui donnent les listes d'apôtres selon l'ordre hiérarchique... Donc Marie de Magdala est ici aussi la mère de Jésus dans la version primitive, et "l'autre Marie" la première ébauche du coup de la pécheresse de service.

Autre indice : où, dans Marc et dans Matthieu, Marie-Madeleine entre-elle en scène ? Au Golgotha ! C'est un peu court ! Il y a bien une femme pour oindre Jésus un peu plus tôt à Béthanie, mais elle n'est pas nommée ni même définie comme pécheresse. Dans Luc, elle surgit au chapitre 8, car Jésus aurait chassé d'elle sept démons (épisode dont on ne trouve trace dans aucun évangile...), puis disparaît jusqu'au dimanche de Pâques !

 

Un martien aux Enfers

Et comment Jésus a-t-il pu apparaître au Douze (1 Cor 15.5) si Judas n'était plus là ?

Serait-ce que ces Douze désignent les douze petits prophètes comme semble l'écrire Justin (Dialogue avec Tryphon, 53 et 87) , d'après le Siracide (49.10) ?

Quant aux douze prophètes, que leurs os refleurissent dans la tombe,
Car ils ont consolé Jacob, ils l'ont racheté dans la foi et l'espérance.

Dans ce cas, le texte de la Première épître aux Corinthiens décrit la descente de Jésus aux Enfers et non ses apparitions après sa résurrection.

Analyse du texte de la Première épître aux Corinthiens, ch. 15 :

Le Christ est mort pour nos péchés, selon les Ecritures,

c'est à dire "selon les prophéties de l'Ancien Testament" :

Pour nos péchés, il a été frappé à mort (Is 53.8)

Ensuite :

kai oti etaphe

Ce qui ne veut pas dire qu'il a "été mis au tombeau" (thante) ou qu'il a "été enseveli" (catathante), mais qu'il "est descendu à la fosse (taphos)", alias le Shéol.

Il est apparu à Céphas

(alias Pierre, alias Petros sans la mythologie mithraciste où il est représenté tenant les clés des Enfers),

puis aux Douze, puis à Jacob,

(le patriarche, cité dans le Siracide, et non le Jacques des Evangiles dont il n'est dit nulle part dans ceux-cis qu'il a bénéficié d'une apparition)

puis à tous les envoyés

(ceux du Père au cours de l'histoire d'Israël et pas forcément la bande à Jésus)

et enfin à l'Ectrôme.

(dans un des systèmes gnostiques, c'est un éon qui a eu la mauvaise idée de quitter le divin Plérôme et a chu vers les cercles inférieurs)

puis il est ressuscité le troisième jour, "kata tas graphas".

Car il était écrit :

Après deux jours, il nous rendra la vie ;
le troisième jour, il nous relèvera,
et nous vivrons en sa présence
. (Osée 6.2)

Evidemment, j'entend déjà les protestations : Vous mutilez le texte!

Pas du tout : Goguel, dans son Introduction au Nouveau Testament, distingue cinq ou si lettres mal cousues dans les deux Aux Corinthiens. Ainsi, ce chapitre 15 est un traité sur la résurrection des morts où les 500 frères du verset 6 n'ont rien à faire.

Où donc Paul appelle-t-il "les Douze" Pierre et compagnie ? Nulle part! En Galates, il parle d'"apôtres" (1.19), de "notables", et de "colonnes" (2.9), et il n'en cite que trois (Jean, Jacques, et Céphas, dont il ne dit nulle part qu'ils ont vécu en compagnie de Jésus...). Lui même a deux compagnons (Tite et Barnabé), pas moins apôtres que les précédents.

Du destin des neuf autres compagnons de Jésus, pas une ligne dans les Epîtres.

Nous avons bien une Epître de Jacques, écrit rabbinique sans rapport avec l'Evangile, où l'on attend encore le Messie (5.7), et où il n'est fait mention de Jésus que dans l'entête et dans une incise (2.1) à la sauce paulinienne (cf Gal 2.6 : Dieu ne fait point acception de personne.) venant rompre le fil de l'exposé.
Nous avons aussi deux Epître de Pierre, dont la première, datant d'Irénée (180) et truffée d'idées pauliniennes, est envoyée chez les brebis de Paul (1.1), et où Jésus est allé prêcher aux Enfers aux esprits de ceux qui furent engloutis par le Déluge et pas à ceux qui mourrurent ensuite (un casse-tête théologique depuis dix-huit siècles...), et dont la seconde, datant d'Origène (220), essaye d'expliquer pourquoi l'agent Jésus ne revient toujours pas.
Plus trois Epître de Saint Jean où l'apôtre n'est pas nommé.
Et enfin une Epitre de Saint Jude, paraît-il disciple de Jésus, qui semble connaître l'Ancien Testament, à défaut de la vie de Jésus...

Je suppose que Raël a eu accès aux archives de l'Opération Jésus et que ses disciples nous éclaireront sur tout cela.

De plus, Paul ne se qualifie nulle part ailleurs de "moindre des Apôtres", bien au contraire :

J'estime ne le céder en rien à ces archiapôtres.
Si je ne suis nul en éloquence, je ne le suis pas en science.
(2 Cor 11.6)

Par conséquent les versets 10 et 11 sont à loger au onzième chapitre de la Seconde Epître aux Corinthiens. Quant au verset 9, c'est un écho des Actes, écrits par un ennemi de Paul qui se garde bien de l'y qualifier d'apôtre et qui fait de Barnabé son parrain (Ac 9.27) alors que Galates présente ce dernier comme son disciple (2.9). Autre débris des Actes en 2 Cor 11.32-33 où Paul s'évade de Damas au milieu d'une homélie sur la révélation qu'il a reçue...

Donc, notre martien arrive aux Enfers et le comité d'accueil rapplique :

- Qui c'est celui-là ?
- Celui qui vous parla au commencement
. (ten archen oti kai lalo umin, Jn 8.25)
J'ai beaucoup à dire sur vous
et beaucoup à condamner.
Mais celui qui m'envoie est vérité
et je dis au monde ce que j'ai entendu de lui.

Puis il lance ses imprécations contre les démons qui tiennent la boutique :

Je m'en vais et vous me chercherez
Et vous mourrez dans votre péché.
Où je vais, vous ne pouvez venir.
Vous, vous êtes d'en bas
Et moi je suis d'en haut.
Vous, vous êtes de ce monde.
Si vous ne croyez pas que je suis
[celui qui est],
vous mourrez dans vos péchés.
(Jn 8.21-24)

Et patati et patata....

Des mythologies anciennes à une mythologie moderne

Ceux qui ne s'intéressent qu'aux soucoupes et n'entendent rien ni à la mythologie comparée, ni à la critique textuelle, auront peut-être été déroutés par mes analyses. Alors résumons en une phrase:

Il est vain de chercher des explications martiennes à des faits imaginaires!

Et je n'ai parlé ici que des deux Testaments. Le Matin des Magiciens cite des héros de la Baghavad Gita juchés sur des chars volants et bombardant leurs ennemis de flèches contenant toute la puissance de l'Univers. Homère a moins d'imagination qui fait prendre Troie par le truchement d'un cheval de bois.

Dans un autre registre, si le Pop Vuh maya ("le livre du conseil", "pop" étant les nattes où s'assoient les Anciens, par extension le conseil) parle de l'engloutissement d'une terre peuplée de 64 millions d'habitants, il ne s'agit pas d'un recensement précis de la population du continent de Mu, mais du nombre 20 (base de la numération maya) à la puissance 6, chiffre rond exprimant un très grand nombre (un alautun dure 20 puissance 6 tuns de 360 jours chacun, soit également 64 millions de tuns, soit un peu plus de 63 millions d'années).

Faut-il que le rédacteur d'une fable pastiche le merveilleux pour qu'on y flaire un lézard et qu'on n'y cherche point d'explication ufomaniaque ? Ainsi Lucien de Samosate voyageant dans les cieux sur le dos d'animaux de son invention, Voltaire utilisant une comète pour amener Micromégas sur la Terre, et Antoine de Saint-Exupéry des oies sauvages pour transporter son Extra-terrestre de Petit Prince? Ou inversement, que l'on donne des détails techniques peut crédibles comme Wells propulsant des Martiens à coups de canon ? Quel marchand de soucoupes a jamais osé trouver une explication ufologique à la fable de Titans entassant des montagnes les unes sur les autres puis lançant vers les cieux d'énormes quartiers de roc ? C'est le même thème que la tour de Babel, doublé du métissage des dieux et des mortels : Charroux a traité les deux thèmes présentés séparément dans la Bible mais s'est gardé du ridicule d'en commenter cette synthèse grecque!

Il est vrai que nous appelons "fable" la religion du voisin aussi sûrement que nous appelons "histoire" ("sainte", en l'occurence) la nôtre. De même, dans le courrier du Télescope, des adorateurs de soucoupes se sont indignés qu'un magazine aussi sérieux traite de l'Atlantide... Quand la Bible parle du Jardin d'Eden, c'est de la mythologie. Quand Rousseau le recycle en "état de nature", c'est de la philosophie. Et quand Marx en fait "le communisme primitif", cela devient une "approche scientifique de l'Histoire"! Et les marxistes de pondre toute une dogmatique sur ce thème, estampillée Science de l'Histoire digne de l'Ere de la Raison, où le "Plan de Dieu" se dit "Sens de l'Histoire", "Peuple Elu" se dit "Prolétariat", "Episcopat" se dit "Comité Central", "prophéties" se dit "plan quinquennal", et je vous passe le reste...

Pour revenir aux témoignages sur les débarquements de Martiens, on peut leur trouver une caractéristique qui rappelle le théâtre des exploits de Jésus : ça se passe toujours en brousse, loin de témoins ayant des responsabilités dans le monde réel... Par contre, pour l'apothéose finale, qu'il s'agisse de la Passion ou de Rencontres du Troisième Type, on veut bien convoquer les foules, à condition que la scène se déroule dans le futur (Spielberg), dans le désert du Sinaï, ou dans les ruines de Jérusalem.

En conclusion, permettez moi, ô ufologues et raëliens de tout poil, de vous léguer une pensée biblique utile à qui veut se plonger dans la Bible :

Le simple croit tout ce qu'on dit.
L'homme avisé surveille ses pas.
(Proverbes, XIV,15)

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